A Rome, Biden ne ménage pas ses efforts pour surmonter la brouille avec la France
Joe Biden a déployé vendredi des trésors de cordialité face à Emmanuel Macron, pour tenter de faire oublier leur brouille autour des sous-marins australiens, tandis que le président français, plus mesuré, parlait de « l’amorce d’un processus de confiance ».
Poignées de main répétées, sourires, assurance de sa « grande affection » pour la France, le « plus vieil allié » des Etats-Unis: le président américain n’a pas ménagé ses efforts auprès de son homologue français, qui l’a reçu à la Villa Bonaparte, ambassade de France auprès du Vatican.
Leur réunion, en tête à tête puis avec leurs délégations, a duré près d’une heure et demie.
« Ce que nous avons fait était maladroit et n’a pas été fait avec beaucoup d’élégance », a déclaré le président américain, l’acte de contrition le plus clair à ce jour de la part des Américains sur l’annonce d’un partenariat de défense avec l’Australie et le Royaume-Uni, qui a pris de court la France.
« Nous avons clarifié ce que nous avions à clarifier », a pour sa part déclaré Emmanuel Macron à propos de cette alliance, qui coûte à la France un énorme contrat de sous-marins avec l’Australie.
Désormais « c’est l’avenir qu’il faut regarder », a-t-il déclaré, plus mesuré dans ses gestes et son ton que le président américain.
Et l’avenir ce sont selon lui des décisions communes « extrêmement concrètes qui viennent en soutien d’actions et d’initiatives communes » sur le climat, la défense ou l’innovation.
Il s’agit aussi pour les deux pays « d’apporter des éléments de clarification indispensable sur ce qu’est la souveraineté européenne et la défense européenne », a ajouté le président français.
En clair, Emmanuel Macron veut obtenir enfin de Washington une bénédiction franche des efforts de la France pour construire une véritable défense européenne. Les Etats-Unis ont pu exprimer une certaine tiédeur face à cette idée, eux qui pilotent l’Otan.
Joe Biden a lui dit que la France était à ses yeux « un partenaire d’une extrême valeur ».
Paris voudrait aussi plus de soutien aux interventions militaires contre les jihadistes au Sahel, Emmanuel Macron saluant les premières mesures « très concrètes et opérationnelles dont nos armées ont pu bénéficier ». Mais sans donner de détails.
– Signal américain –
La rencontre des deux hommes doit déboucher sur un communiqué, a déjà fait savoir la Maison Blanche.
Pour Paris, le fait que le gigantesque convoi présidentiel américain – 84 voitures – se déplace en terre française était déjà un signe de la volonté américaine de recoller les morceaux.
Les Etats-Unis avaient été visiblement pris de court par la très vive réaction française à l’annonce mi-septembre d’une nouvelle alliance, baptisée « Aukus », entre les Etats-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni dans la zone indopacifique.
Outre le fait de ne pas avoir été consulté, Paris avait été très dépité par la première conséquence de ce partenariat: l’abandon par l’Australie d’un mégacontrat de sous-marins français.
Mécontent, Emmanuel Macron, après avoir rappelé l’ambassadeur de France aux Etats-Unis, avait attendu une semaine avant de s’entretenir avec Joe Biden le 22 septembre, une discussion téléphonique qui avait permis d’amorcer la détente.
Avant le président français, Joe Biden, soucieux de consolider les alliances européennes des Etats-Unis malmenées pendant la présidence Trump, a vu à Rome Mario Draghi, chef du gouvernement italien, considéré par certains commentateurs comme un nouvel homme fort sur la scène politique européenne.
Lors de cette entrevue, ils ont convenu de « l’utilité de développer une Europe de la défense », a fait savoir le gouvernement italien, un sujet décidément omniprésent.
Dans sa version de l’entretien, la Maison Blanche ne mentionne pas précisément l’Europe de la défense, mais assure que Joe Biden et Mario Draghi ont « réaffirmé l’importance de l’Otan » en particulier dans la Méditerranée.
Ces rencontres font office de lever de rideau avant le sommet du G20 sous présidence italienne, qui se tient samedi et dimanche, suivi de la grande réunion COP26 sur le climat, à Glasgow.
En l’absence des présidents chinois et Russe, Joe Biden entend bien donner le ton. Même fragilisé par ses difficultés à faire voter chez lui de gigantesques dépenses publiques, et par le retrait chaotique d’Afghanistan, il assure à qui veut l’entendre que « l’Amérique est de retour » pour mener la grande offensive des démocraties face aux régimes autoritaires.
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