Violences sexuelles: enquête ouverte après les accusations de la patineuse Sarah Abitbol
Le sport français rattrapé par la vague #MeToo: le parquet de Paris a ouvert mardi une enquête pour viols et agressions sexuelles sur mineurs après les accusations de l’ancienne championne de patinage Sarah Abitbol contre son ex-entraîneur Gilles Beyer.
L’affaire est née de la publication jeudi d’un livre témoignage de celle qui fut dix fois championne de France de patinage artistique en couple, multimédaillée européenne et mondiale en couple. Elle y dénonce des faits qui se seraient produits entre 1990 à 1992, une période en principe couverte par la prescription, alors qu’elle était âgée de 15 à 17 ans.
Dans un communiqué, le procureur de la République de Paris Rémy Heitz a précisé que les investigations, confiées à la brigade des mineurs, « s’attacheront à identifier toutes autres victimes ayant pu subir, dans le contexte décrit, des infractions de même nature », au-delà des faits évoqués dans cet ouvrage.
« Je suis contente, je suis soulagée. Cette prise de parole enfin commence à porter ses fruits », a réagi Mme Abitbol sur la chaîne de télévision BFM TV. « Je suis émue, car c’est 30 ans de combat », a-t-elle ajouté.
Pour la ministre des Sports Roxana Maracineanu, l’ouverture d’une enquête est « un signal fort ». « La parole des victimes doit être entendue par la justice », a-t-elle tweeté en milieu de journée.
Vendredi, Gilles Beyer, 62 ans, a reconnu, dans une déclaration écrite à l’AFP, « des relations intimes » et « inappropriées » avec Sarah Abitbol, lui présentant des « excuses ».
L’ancienne championne les a aussitôt refusées et déclaré sur le site internet de L’Obs qu’elle attendait une deuxième étape, « celle qui mettra en lumière la responsabilité de tous ceux qui ont couvert, dans le club (les Français volants, NDLR) et à la fédération ».
Démission ?
Au début des années 2000, sur la base d’un signalement de parents, Gilles Beyer avait fait l’objet d’une enquête judiciaire qui n’a pas abouti, puis d’une enquête administrative, qui a conduit le ministère des Sports à mettre fin à ses fonctions de cadre d’Etat, le 31 mars 2001.
Malgré cette mise à l’écart, Gilles Beyer a poursuivi sa carrière au sein du club parisien des Français volants, présidé par son frère Alain, jusqu’à son éviction vendredi, et a effectué plusieurs mandats au bureau exécutif de la Fédération française des sports de glace (FFSG) jusqu’en 2018.
D’autres anciennes patineuses ont émis des accusations similaires contre M. Beyer et d’autres entraîneurs.
Hélène Godard a accusé ainsi, dans le quotidien sportif L’Equipe et l’hebdomadaire L’Obs, Gilles Beyer d’avoir eu des rapports sexuels avec elle, alors qu’elle avait 13 et 14 ans.
Anne Bruneteaux et Béatrice Dumur ont accusé elles un autre ancien entraîneur, Michel Lotz, d’avoir abusé d’elles dans les années 1980 alors qu’elles avaient 13 ans.
Après les scandales qui ont éclaboussé notamment le monde du cinéma et le milieu littéraire, cette affaire a plongé la FFSG et son insubmersible président Didier Gailhaguet dans la tourmente.
Lundi, la ministre des Sports a reçu M. Gailhaguet, à la tête de la FFSG depuis 1998, à l’exception de la période 2004-2007, pour qu’il s’explique notamment sur le maintien en poste, dans les années 2000 de Gilles Beyer, malgré les soupçons qui pesaient déjà sur lui.
Elle a également demandé sa démission, mais le patron de la fédération, âgé de 66 ans, a éludé les questions sur son avenir, promettant de faire des révélations au cours d’une conférence de presse mercredi.
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