Retour à la terre: la promesse d’un mode de vie résilient
Face à la pandémie, la nature apparaît comme le dernier espace de liberté, mais la loi s’immisce dans tous ses replis. Petit guide à l’adresse des aventuriers de l’authenticité.
La terre n’a jamais cessé d’être un bien très convoité. On se souvient de la tempête qu’avait déclenchée le ministre bruxellois de l’Environnement Alain Maron (Ecolo), en annonçant vouloir acheter des terres agricoles dans les Brabant wallon et flamand pour nourrir les Bruxellois. Au niveau « micro », la volonté d’assurer sa sécurité alimentaire, combinée à un besoin très fort de nature, est stimulée par la peur du lendemain, la menace climatique et les troubles politiques que pourraient susciter d’importants déplacements de populations. Sans compter la méfiance sous-jacente à l’égard de l’Etat. Les survivalismes d’extrême gauche et d’extrême droite prospèrent sur ce terrain peu sûr.
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Le tropisme vert se traduit par un désir de vie plus simple, d’habitat plus léger et de réappropriation de son environnement. Il séduit toutes les générations. Les jeunes au début de leur vie, les plus âgés à l’heure des bilans. En 2019, lors de l’adaptation du Code du logement qui les reconnaît, il y avait déjà 25 000 habitations légères en Wallonie. La pandémie a accéléré les changements en cours. L’interdiction des voyages non essentiels, le télétravail obligatoire et la prohibition des contacts ont donné des bases rationnelles à ce retour à la terre qui se traduit notamment par l’envolée des prix des résidences secondaires.
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D’autres voies sont explorées, mais qui passent souvent par la propriété privée. Laurent, 50 ans, a acheté une petite bande forestière en bordure d’un chemin. Il sait qu’il n’en restera pas là. L’idée de participer au repeuplement de villages espagnols ou français équipés aux meilleures normes environnementales l’intéresse tout autant. « Les gens ne comprennent plus le système, décode-t-il. Ils cherchent des alternatives pour s’extraire de cette complexité et construire quelque chose un peu à côté. Marcher dans les bois enlève une couche à la complexité de la vie. » La pandémie l’a fait « descendre de ses avions » et poussé à envisager ses trente prochaines années avec une meilleure qualité de vie. « Nos parents qui ont connu la guerre avaient besoin de thésauriser pour se rassurer, d’avoir de grosses maisons et de belles voitures. Aujourd’hui, on s’autorise à s’ancrer dans des choses simples pour avoir plus de bonheur et moins de stress. »
Hanté par le désir de fuir un environnement rural devenu trop bruyant et par l’urgence climatique « dont il est à présent pleinement conscient », Michel, 58 ans, a renoncé à son premier projet: un bâtiment-serre au milieu de 5 000 mètres carrés, avec logement, entrepôt, maraîchage, lagunage et petit élevage. « Je ne souhaite plus construire en dur, confie-t-il, car ce serait participer à la frénésie immobilière où chacun cherche son petit coin de paradis au détriment de la nature et donc, du bien commun. Le constat que notre environnement proche se dégrade ne justifie pas cela. »
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Aujourd’hui, il réfléchit à l’acquisition d’un terrain pour simplement l’entretenir, y planter éventuellement quelques arbres, être plus proche de la nature et de la vie sauvage, écouter le silence et les oiseaux. « Ma famille, mes amis, les enfants et leurs amis pourraient y passer quelque temps. Ce lieu pourrait être le point de départ pour des promenades dépaysantes à la découverte des environs. » Son élan bâtisseur pourrait toutefois trouver un exutoire dans la création d’une réserve d’eau pour les arbres fruitiers et les haies. Il devra aussi prévoir une tente ou une tiny house équipée de panneaux solaires. S’entendre éventuellement avec un voisin pour surveiller les moutons en son absence. « L’important, c’est de considérer l’endroit comme un bien commun plutôt qu’une propriété strictement privée. » La terre est limitée. Et son partage, une éternelle question.
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