Mélanie Geelkens
Une sacrée paire, Janine (chronique)
Jeanine Lambotte est la première femme à avoir présenté le JT. Depuis, des journalistes féminines, y’en a évidemment plein les écrans, les radios, les journaux. Y en a encore plus dans les universités et les hautes écoles en communication. Majoritairement diplômées, minoritairement engagées.
Les Russes étaient en train de recouvrir Berlin de barbelés. C’était en 1961, il y a pile soixante ans. C’était la guerre froide et c’était le sujet d’ouverture du premier JT présenté par Janine Lambotte. Une femme. Depuis dix ans que la télévision balbutiait, ça n’était jamais arrivé. Ni en Belgique, ni en Europe. Il y avait bien eu quelques speakerines – la Bruxelloise avait d’ailleurs débuté comme ça, puis en présentant des capsules à l’occasion de l’Exposition universelle de 1958. Une fois, une chèvre l’y avait entortillée autour de son micro.
Janine l’amusante, Janine la divertissante. « On ne savait pas quoi faire de moi, parce que j’étais une femme, racontera-t-elle, en 2008, à la RTBF. On n’imaginait pas une femme faire quelque chose de sérieux à la télévision. C’était insensé. » Mais Janine Lambotte a passé (comme quatre autres candidates sur… 800 participants) l’examen de journalisme, et ce qu’elle veut, c’est présenter le journal télévisé. Elle ne l’obtient que grâce au forcing d’un dirigeant de la chaîne et malgré le scepticisme voire les coups bas de certains collègues, qui, par exemple, l’envoient couvrir la barbante actualité européenne. « Cette époque des débuts de Janine Lambotte et de la télé était – il faut simplement le reconnaître – extrêmement machiste », concédait (toujours, en 2008, sur la RTBF) l’ancien présentateur Pierre Delrock.
Majoritairement diplômées, minoritairement engagées. Elles ne composent que 35% de l’effectif journalistique belge francophone.
Il faut simplement le reconnaître, ça n’a pas complètement changé. Depuis Janine Lambotte, des journalistes féminines, y en a évidemment plein les écrans, les radios, les journaux. Certaines se piquent même de tenir des chroniques sur l’égalité des genres, les insolentes. Y en a encore plus dans les universités et les hautes écoles en communication. Majoritairement diplômées, minoritairement engagées. Elles ne composent que 35% de l’effectif journalistique belge francophone. Chez les jeunes, pourtant, c’est la parité. Mais au fil des ans, elles abandonnent. Pas assez tenaces ou combatives, peut-être. Insuffisamment prisées des rédactions, sans doute. Surtout lorsqu’elles enfantent. Boucler le journal à 21 heures, difficilement compatible avec l’histoire du soir à raconter au gamin. Et puis, qui va faire à bouffer?
Ou alors, elles couvrent des sujets dans leurs cordes. La culture. La mode. La cuisine. L’enseignement, éventuellement. Quasi jamais la politique, l’économie, l’investigation. Pour ça, « il faut des reins solides, il faut être fort. Et les hommes sont naturellement plus forts », dixit un journaliste (mâle) qui répondait à une étude sur le genre au sein de la profession. D’ailleurs, elles sont rarement aux commandes. Une seule rédactrice en chef en presse écrite généraliste (au Vif, sans forfanterie). Une seule dirigeante d’une télévision locale. Enfin, elles gagnent moins. Evidemment. Leur revenu mensuel moyen s’élève à 2.120 euros net, contre 2.464 euros pour celui de leurs chers confrères (1).
Les scoops, c’est rarement à elles que le politique, l’avocat, l’entreprise, le citoyen vont les livrer. Un peu de sérieux. Les livrer en pâture sur des sites de rencontres, en revanche, pas de souci. En août dernier, les identités d’une dizaine de consoeurs ont été usurpées pour répondre à des petites annonces à caractère sexuel. Elles s’en sont rendu compte en recevant des tas de « tu suces? » et tout autant de photos de phallus en érection. Toutes ont en commun de régulièrement prendre la parole publiquement. Comme Janine Lambotte, en 1961, sur le petit écran: apparemment, pour certains, c’est dérangeant.
(1) Source: Association des journalistes professionnels.
0
femme. Mais, en revanche, 8 hommes. La nouvelle commission mise en place par le ministre du Budget, Jean-Luc Crucke (MR), pour réfléchir à un avenir (meilleur) pour la dette wallonne n’aura même pas fait l’effort symbolique d’intégrer une seule experte. Ce nouvel organe rassemble, paraît-il, « la crème des spécialistes en finances publiques ». Comprenez: que des mâles blancs universitaires et, pour la plupart, quinquagénaires. Forcément.
Tampons anglais à 0%
Alors que l’Ecosse a, en 2020, instauré la gratuité des produits menstruels, le Royaume-Uni vient de supprimer la TVA sur les tampons, serviettes et compagnie, afin de les rendre financièrement accessibles à toutes. Une mesure rendue possible grâce… au Brexit, la loi européenne empêchant de passer sous les 5% de TVA, selon Associated Press. En Belgique, celle-ci est passée en 2017 de 21 à 6%. Sortir de l’Union européenne pour pouvoir l’abolir serait sans doute un peu cher payé.
Madame vaccin
Si le monde se sort de la Covid-19 au moyen de la vaccination, ce sera grâce à elle: Katalin Karikó. Cette biochimiste hongroise de 66 ans fut la première à travailler sur la technique novatrice du vaccin à ARN messager, technique innovante utilisée par les firmes Moderna et BioNTech. Tellement innovante que, tout au long de sa carrière, la scientifique avait essuyé quantité de refus pour financer ses recherches. Jusqu’à sa rencontre, à la… photocopieuse, avec le chercheur Drew Weissman, qui entendait développer un vaccin contre le VIH. Puissent leurs travaux venir à bout si pas du sida, du corona.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici