Sammy Mahdi, président des jeunes CD&V © Belga

Sammy Mahdi (CD&V): « La grève de la faim n’aurait pas duré aussi longtemps si le gouvernement avait parlé d’une seule voix »

Tex Van berlaer Collaborateur Knack.be

« Nous devons screener les migrants aux frontières extérieures de l’Union européennes », dit le secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration, interrogé par nos confrères de Knack.

« Il est criminel que rien ne se passe depuis vingt ans. » Pour le secrétaire d’Etat fédéral Sammy Mahdi (CD&V), interrogé par nos confrères de Knack, une adaptation législative doit avoir lieu durant cette législature pour accélérer les procédures de demande d’asile. « Il y a des gens qui se trouvent depuis des années dans des procédures et qui, à chaque décision intermédiaire, décident d’aller en appel, dit-il. C’est absurde, mais ils en ont le droit. Savez-vous qu’il y a des articles de loi qui renvoient à des articles qui n’existent pas? »

Votre prédécesseur, Theo Francken (N-VA), avait également promis une nouvelle législation en matière d’asile. En vain…

Sammy Mahdi: Quand j’ai commencé en tant que secrétaire d’Etat, j’ai acheté une paire de ciseaux pour couper le ruban de la nouvelle législation. (agacé) Il n’y avait encore absolument rien! C’est hallucinant. Nous sommes occupés à le faire, cela doit arriver le plus vite possible.

Vous ne vous taisez pas, même pendant les mois d’été. Récemment, vous avez annoncé votre volonté de ne pas recevoir de migrants venus d’Italie. Ils sont touché de plein fouet, non?

Mahdi: De plein fouet? La Belgique accueille annuellement trois fois plus de demandeurs d’asile que l’Italie. Deux bateaux de migrants sur trois qui arrivent en Italie, n’ont pas droit à la protection internationale.Mais nous devrions quand même les accueillir pour ensuite tenter de les renvoyer? Bonne chance. Seul le nouveau pacte migratoire européen fonctionnera. Tous ceux qui viennent en Europe doivent être screener aux frontières extérieures de l’Union.

L’Irlande était prête à prendre dix migrants venant d’Italie. Les petits ruisseaux font les grandes rivières.

Mahdi: Et une semaine plus tard, des centaines de navires arrivent à nouveau. Nous ne faisons rien d’autre que lutter contre des incendies. En plus de les screener aux frontières, nous devons aussi pouvoir renvoyer les gens. L’Europe s’affaiblit elle-même. Nous devrions pouvoir tenir un seul langage à des pays comme le Maroc, l’Algérie et l’Irak. ‘Vous ne voulez pas reprendre vos ressortissants? OK, mais alors vous le sentirez économiquement.’ Dans le même temps, nous devons bâtir de bonnes relations avec les pays qui agissent correctement.

Comment est la situation dans l’Espace méditerranée?

Mahdi: Nous devons faire attention. La situation en Afghanistan est préoccupante. Nous avons envoyé une lettre à la Commission européenne avec d’autres Etats membres pour éviter que l’on ne revive la crise migratoire de 2015. Notre système migratoire est trop fragile.

Vous voulez élargir aux Afghans le deal turc, conclu en 2016 pour l’accueil des réfugiés syriens. Vous devriez dès lors donner de l’argent au président turc Recep Tayyip Erdogan.

Mahdi: L’accueil a un prix. 95% de tous les migrants vivent dans la région, nous devons donc soutenir ces pays. D’ailleurs, nous ne parlons pas seulement avec les responsables de gouvernement, mais aussi avec les organisations internationales. Dans le cas du deal turc, bien des milliards vont à l’Organisation des Nations unies pour les réfugiés. Le plus important, c’est que l’accueil des Afghans soit suffisant dans la région afin qu’ils ne doivent pas traverser l’Europe.

Revenons au pays. Selon la N-VA, il y aurait une nouvelle mode chez les réfugiés dont l’asile a été rejeté: refuser un test PCR. De sorte à ce qu’ils ne puissent pas prendre l’avion. Cette année, 91 personnes seraient restées en Belgique de la sorte.

Mahdi: Je suis occupé depuis un petit temps à rédiger un projet de loi leur imposant un test PCR, mais c’est tout sauf évident. L’Allemagne le fait déjà et les Pays-Bas y songent. Le Covid-19 ne peut pas être une excuse pour ne pas s’en tenir aux règles. Il y a des gens qui ont un passé criminel, nous devons les expulser.

Pendant la crise gouvernementale, il était frappant de voir Vooruit continuer à vous soutenir, tandis que son partir frère, le PS, menaçait de quitter le gouvernement s’il y avait un mort, tout comme Ecolo. La ligne de fracture se situe-t-elle entre Flamands et francophones?

Mahdi: (pèse ses mots) Le programme de Vooruit n’est pas celui du PS. Il y a également une différence dans la façon de mener le débat. Si je parlais avec un Wallon moyen dans la rue de cette grève de la faim, j’entendrais exactement la même chose qu’en Flandre. Dans les débats politiques, on ressent surtout la différence avec la culture du débat du sud, qui repose souvent sur des questions de principe. Les Flamands sont plus concrets: qui sont ces grèvistes de la faim, depuis combien de temps sont-ils là? C’est frustant aussi que la presse parle de ‘demandeurs d’asile’. Non, ce ne sont pas des gens qui ont besoin d’une protection, ils ne le demandent même pas.

Quel est l’état de la situation des grèvistes de la faim?

Mahdi: Les 475 grèvistes ont l’intention d’intoduire leurs dossiers individuels en un seul paquet.

Selon les critiques, il n’est pas question d’une régularisation collective, mais bien d’une régularisation collective individuelle.

Mahdi: Oh, mais je suis content que l’opposition demande des pourcentages concrets du taux de reconnaissance. De cette manière, tout le monde verra que les règles sont ce qu’elles sont. Dans mes dialogues avec les grèvistes de la faim, j’ai toujours été honnête. Ma politique doit être équitable. Pourquoi auraient-ils davantage droit à la régularisation que ceux qui n’occupent pas des églises?

Une simple question: les dossiers des grèvistes de la faim sont-ils traités de façon prioritaire?

Mahdi: Oui. Ils font partie des groupes prioriaires. Je les ai prévenus: la chance est grande qu’ils reçoivent rapidement une réponse négative

La grève de la faim aurait donc pesé?

Mahdi: Parce qu’ils doivent attendre quelques mois de moins pour recevoir leur réponse? Si cela a permis d’arrêter la grève et d’éviter que quelqu’un ne meurt, je peux vivre avec ça. Encore une fois, il n’y aura pas de régularisation collective et ils n’y aura pas de critères pour la reconnaissance.

Qui a cousu les bouches de ces gens?

Mahdi: Bonne question. J’espère que ceux qui l’ont fait peuvent encore se regarder dans un miroir. Je n’aurais pas pu le faire.

Comment avez-vous vécu, en tant que jeune politique, le fait d’être à la source d’une crise politique?

Mahdi: (réfléchit longuement) J’ai eu du mal à le comprendre. C’est une thème émotionnel, des gens risquaient de mourir.. Je comprends que les présidents de parti défendent leur propre point de vue. Mais un gouvernement a une responsabilité.

Cela aurait-il pu être évité?

Mahdi: Au sein du gouvernement, on me demandait quel était la meilleure formule pour mettre fin à la grève de la faim. J’ai répondu au moins trois fois: un gouvernement au sein duquel chaque parti dit que cela ne peut pas fonctionner. Les faux espoirs étaient la seule chose qui prolongeaient la crise. Le point de vue clair du Premier Alexander De Croo (Open VLD) a permis d’éviter un drame. Mais la grève de la faim n’aurait pas durée aussi longtemps si le gouvernement avait parlé d’une seule voix.

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