Prix de l’énergie: la future ordonnance gaz-électricité atteindra très partiellement son but
La commission de l’Environnement et de l’Energie du parlement bruxellois a entamé le débat au sujet du projet d’ordonnance visant à réorganiser les marchés de l’électricité et du gaz à Bruxelles.
La longue séance entamée à 08h30 s’est prolongée jusqu’en début d’après-midi en l’absence d’une partie de l’opposition (PTB, cdH, N-VA). Celle-ci s’est montrée très critique à l’égard des circonstances de travail autour d’un texte de 400 pages reçu seulement il y a quelques jours,
Le ministre de l’Energie, Alain Maron (Ecolo), qui a invoqué la nécessité d’aller vite pour activer le dispositif de protection des clients précarisés a présenté le contenu du projet. La révision de l’ordonnance existante prévoit notamment la création d’un service universel sous la forme d’une « fourniture garantie », inédite à Bruxelles. Les ménages vulnérables et endettés seront ainsi facturés au tarif social auprès du fournisseur de dernier ressort (Sibelga) pour une durée de douze mois renouvelable.
L’ordonnance prévoit également la suppression des limiteurs de puissance, mécanisme jugé coûteux et inefficace pour limiter l’endettement des ménages concernés.
En parallèle, les différents acteurs des marchés de l’énergie seront amenés à communiquer de manière plus claire et transparente afin que tous les Bruxellois(es) disposent d’informations précises sur leurs consommations et les différents types de contrats de fourniture.
Pour accélérer la transition énergétique juste et solidaire de la Région bruxelloise, la réforme du cadre régissant les marchés de l’énergie est vaste. Les principaux jalons posés par la réforme visent ainsi à développer les communautés d’énergie pour soutenir le partage local d’énergies renouvelables.
Le projet d’ordonnance met encore en place le cadre légal pour poursuivre le placement de compteurs électriques communicants.
Au cours d’échanges fort techniques, le MR, par les voix de Viviane Teitelbaum et d’Aurélie Czekalski, a déposé une proposition d’ordonnance alternative. Il a notamment jugé que le dispositif avancé par Alain Maron ne permettra pas un juste équilibre entre protection des consommateurs et attractivité des marchés pour les fournisseurs.
Pour les libéraux francophones, le statut de client protégé demeure peu attractif. Dans les faits, il est estimé qu’environ 75.000 ménages bruxellois sont touchés par la précarité énergétique, alors que seulement 2.160 ménages (pour l’électricité), soit 0,4% des ménages bruxellois sont fournis par le fournisseur social et protégés de la coupure.
En outre, la procédure de résiliation de contrat demeure très complexe. Dans tous les cas, la demande de résolution du contrat et d’autorisation de coupure ne peut être effectuée sans l’autorisation du juge de paix et intervenir qu’après une longue procédure et le maintien de la fourniture pendant une période de 60 jours minimum de façon ininterrompue.
La procédure de recouvrement des dettes des clients non-protégés est par conséquent extrêmement longue et pénalisante et contribue à aggraver leur endettement, a encore dit Viviane Teitelbaum. Pour les fournisseurs qui ne se bousculent déjà pas au portillon à Bruxelles, il en résulte un risque financier et une charge opérationnelle élevée, d’autant plus qu’ils supportent les charges et coûts pour l’ensemble de la facture.
Pour la collectivité, l’opération a aussi un coût pointé par le MR qui cite Brugel, le régulateur du marché bruxellois de l’énergie: 40.806.973 euros par an dont 72,1% est à charges des fournisseurs (29.406.96 euros). La fourniture d’énergie impayée est prise en charge par les fournisseurs, qui répercutent cette charge sur le client final.
Volontairement absent – comme la N-VA et le PTB – des débats lundi matin en raison du timing forcé de la réunion du jour, le cdH a jugé que le texte sur la table ne favoriserait pas une transition énergétique rendue d’autant plus nécessaire par la crise dans le secteur du gaz et de l’électricité.
En marge de la séance, le député cdH Christophe De Beukelaer a jugé la protection prévue du consommateur inefficace et coûteuse pour la collectivité. « Nous saluons la création d’un fournisseur de dernier recours, mais nous regrettons que la procédure de recouvrement des dettes ne soient pas revue: il faut mettre fin au passage systématique par le juge de paix, et revoir l’obligation de fournir trois ans pour les fournisseurs », a-t-il dit.
La Flandre avance 12 fois plus vite que Bruxelles installer les compteurs dits intelligents (33.000 par an à Bruxelles contre 33.000 par mois en Flandre), pourtant essentiel pour la transition énergétique, a encore soutenu l’élu humaniste. Selon lui, pour l’instant, la Région ne fait poser ces compteurs que sous certaines conditions,
Pour Jan Busselen (PTB-PVDA), qui n’a pas nié certaines avancées sociales, c’est plus largement le cadre du marché libéralisé de l’énergie qu’il faut remettre en cause car en l’état, c’est la collectivité qui assume les charges et le privé qui tire les bénéfices de l’opération.
Le débat sera poursuivi mercredi en commission par l’examen des articles et des amendements. Le projet d’ordonnance devrait être examiné et soumis au vote en séance plénière vendredi.
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