Pourquoi, en Flandre, plus personne ne contredit le Vlaams Belang de Tom Van Grieken (analyse)
Les sondages pour le parti de De Croo sont catastrophiques. Il est pourtant populaire. Mais (au moins) cinq présidents de parti compromettent son avenir politique. C’était bien lancé, avec Tom Van Grieken, dont la radicalité servait, par contraste, la modération d’Alexander De Croo. Mais ça, c’était avant…
Tom Van Grieken était un ennemi bien commode pour Alexander De Croo, au début.
Jeune dirigeant impétueux d’un parti infréquentable prêchant le chaos, il offrait au raisonnable libéral censé faire fonctionner une coalition des bonnes volontés un confortable repoussoir. Les outrances de l’un devaient pouvoir encore mieux exposer la fiable expertise de l’autre, autour duquel, alors, tourneraient avantageusement tous les débats. En ce sens, la manifestation motorisée du 27 septembre 2020 au Heysel aurait pu autant aider Alexander De Croo qu’elle mobilisa autour de Tom Van Grieken. Ces milliers de moteurs pétaradant contre la Vivaldi donnèrent du souffle aux manifestants d’extrême droite. La menace de la fumée et de leur boucan avait de quoi effrayer les « gens raisonnables » dont les partis de gouvernement, généralement, font un vivier autant qu’une bannière. Pourtant, depuis, Alexander De Croo s’en est rarement pris à Tom Van Grieken et au Vlaams Belang. Il a évité de les confronter, à une seule exception, au moment de l’affaire Jürgen Conings. Son président de parti, Egbert Lachaert, n’en fait pas une cible non plus.
Alors, puisqu’Alexander De Croo ne veut pas le faire, et puisque dans son parti personne n’a eu l’air de trouver ça nécessaire, Tom Van Grieken n’a plus vraiment de contradicteur au gouvernement. Et donc en Flandre, il oriente les débats à sa guise, à coups d’interviews qui font du bruit dans les médias et de publications sponsorisées qui font de l’engagement sur les réseaux sociaux. Voire avec un débat avec un président de parti francophone…
Il n’a même pas à faire en sorte que ça aille mal dans le gouvernement fédéral, ce dernier fait lui-même en sorte qu’il aille mal. Il n’a même pas à trouver des critiques à adresser au gouvernement fédéral: celui-ci les sert lui-même à l’opposition, qui peut bien à son aise en amplifier le volume.
Tom Van Grieken est le maître d’un chaos dont Alexander De Croo se défile.
Les contestations autour de la gestion de la crise sanitaire, ou l’énorme campagne que s’offrit le Vlaams Belang autour de la désignation d’Ihsane Haouach, ou les virulentes imprécations sur le nucléaire, furent généreusement amorcées depuis la coalition elle-même. Là où l’extrémisme de l’opposition devrait renforcer la respectabilité de la majorité, ce sont en fait les erreurs du gouvernement qui rendent crédibles les horreurs de l’extrême droite. Le tout se nouant et se dénouant à la propre convenance de Tom Van Grieken, si bien qu’un sujet dans lequel ne s’engage pas le Vlaams Belang n’a, en Flandre, que peu de chance de sortir de l’insignifiance.
Sans adversaire au gouvernement, le Vlaams Belang s’en est trouvé un dans l’opposition. A moins que ce fut l’inverse: aujourd’hui, la N-VA lui conteste le statut de meilleur opposant d’un gouvernement que l’un comme l’autre estiment illégitime. Le parti de Theo Francken et Bart De Wever, alors, peut se permettre de se donner l’air de la formation raisonnable, puisque celui d’Alexander De Croo et d’Egbert Lachaert semble s’y refuser.
Au fond, c’est un peu à cela qu’on reconnaît, en politique, ceux qui sont maîtres du jeu. Tout, toujours, leur tourne autour. Y compris leurs adversaires, quand ils ont compris qu’il vaut mieux confronter le maître du jeu que l’éviter.
Et là, Tom Van Grieken est le maître d’un chaos dont Alexander De Croo se défile.
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