Carte blanche
Métro à Bruxelles: C’est pour aujourd’hui ou pour demain ?
Le débat autour de la gratuité des transports en commun est intéressant. Mais au-delà de ces promesses de campagne électorale irréalistes, il ne faudrait pas éclipser l’essentiel: doter Bruxelles d’une offre de transports publics digne d’une métropole internationale.
Ce qui n’est vraiment pas le cas aujourd’hui! Pourtant, l’histoire du métro bruxellois est particulièrement intéressante. Le premier embryon de métro dans notre Ville-Région a en effet vu le jour 100 ans après les réseaux de New York et de Londres. Et 70 ans après le métro de Paris construit … par un Belge, le Baron Empain. Depuis, nous n’avons jamais rattrapé notre retard sur ces grandes villes. Pis, en termes de vision, d’étendue et de niveaux de développement (paiements sans contact, rames automatiques, etc.) , nous avons même été largement dépassés par les métros de Pékin, Mexico City, Singapour ou encore du Caire.
Le projet du « Métro Nord » avalisé à la table du Gouvernement bruxellois, avec l’appui de BELIRIS, vise à convertir dans un premier temps l’axe de prémétro en véritable métro vers la station Albert et, dans un deuxième temps, prolonger la ligne vers Schaerbeek et Evere en construisant 7 nouvelles stations (jusque Bordet) devrait s’achever en 2030 et coûter moins de 2 milliards. Nous disons bien « devrait » car ce projet ne fait toujours pas l’unanimité et sur lui pèse l’épée de Damoclès d’une majorité régionale au sein de laquelle siègerait un parti qui lui est hostile. Pour nous, ce serait une erreur que de tergiverser ! Les études ont commencé il y a 30 ans. Le besoin est établi. Les financements existent. Les permis seront octroyés! On doit y aller!
Si ce projet est nécessaire, il n’est cependant pas suffisant ! Il faut définir clairement un plan d’investissements pluriannuel de transport en commun jusque 2050. Il doit inclure le bus, le tram, le métro ainsi que tous les nouveaux modes de transports. Les Japonais et les Suisses définissent leurs plans de transport et leurs horaires, à la minute près, avec 20 ou 30 ans d’avance ! Le prochain Gouvernement bruxellois devra définir un plan d’actions d’ici à 2050.
Il faut définir clairement un plan d’investissements pluriannuel de transport en commun jusque 2050. Il doit inclure le bus, le tram, le métro ainsi que tous les nouveaux modes de transports.
Beaucoup de politiques utilisent aujourd’hui le thème des transports publics pour faire de la communication. Mais, il nous semble important de revenir à une question de base : « A quoi servent les transports en commun ? ». Ils permettent tout simplement aux gens de se déplacer d’un endroit à un autre, rapidement et en toute sécurité . Ils permettent à ceux qui ne possèdent pas de voitures (ou qui ne souhaitent pas l’utiliser) d’aller travailler, d’étudier, de faire des courses ou encore de se rendre chez un proche. Pour la sécurité du transport, l’objectif est plutôt atteint même s’il reste un important chantier que nous avons ouvert en lien avec la lutte contre les harcèlements sexuels dans ces transports en commun. Par contre, pour la rapidité, on n’y est pas du tout.
Prenons l’exemple d’un étudiant qui habite à Neder-over-Hembeeck et étudie à Ixelles, par exemple, à l’ULB. Il y a 12 km à parcourir. Il va « mettre » (nous avons presque envie de dire « perdre ») 1 heure en bus et tram, souvent bondés! C’est deux fois plus qu’en voiture. En métro, il mettrait 20 minutes. 3 fois plus vite. C’est normal quand ont sait que la une vitesse commerciale d’un métro est de 30 km/h et n’est que rarement impacté par des évènements ponctuels contrairement aux trams !
Le développement du métro bruxellois est une urgence absolue. Tout d’abord, le métro est le coeur d’une ville moderne car ils transportent bien plus que des gens. Ils transportent également leurs idées et leurs espoirs. Ensuite parce qu’il permet de décloisonner les quartiers, décongestionner le trafic de surface et libérer de l’espace pour les piétons et les cyclistes !
Il est, par ailleurs, le transports le plus utilisé aujourd’hui par les usagers de la STIB. Sur environ 750 000 déplacements quotidiens dans les transports de la STIB, le métro, avec ses 350 000 voyageurs par jour, représente une part de 45 % devant les bus avec 29 % et les trams avec 26 %. Enfin, il permet de réduire l’empreinte carbone des déplacements individuels dans une ville en plein essor démographique.
Le développement du métro bruxellois est une urgence absolue.
Si l’on veut – enfin – jouer dans la cour des grands, il faut se doter des infrastructures qui nous permettent de le faire. En termes de longueur, nos 35 km (lignes de prémétro non comptées) nous positionne à la 72ème place des métros du monde (sur 170). C’est moins bien que Sofia (Bulgarie), Helsinki (Finlande) ou Tachkent (Ouzbékistan).
Ce développement passe par deux phases. Il s’agit de moderniser et rationaliser ce qui existe déjà, en complément au développement de la nouvelle offre de train à l’intérieur de la Région bruxelloise, l’offre S. Mais aussi de créer de nouvelles stations de métro et train et prolonger certaines lignes notamment vers Berchem-Sainte-Agathe (via Ganshoren, Koekelberg, Molenbeek) , Uccle, Ixelles (entre autres, le pôle universitaire VUB-ULB) et Neder-over-Heembeeck
Ces investissements sont nécessaires! Bruxelles figure parmi les villes les plus embouteillées du monde. Le coût de cette immobilité a été estimé par le patronat bruxellois à un demi-milliard d’euros par an. Les plus optimistes en concluront qu’en 20 ans, cet effort est rentabilisé pour l’économie bruxellois. Les plus pessimistes que ces investissements en métro s’amortissent sur 100 à 150 ans!
Doter Bruxelles d’un métro digne de ce nom est donc urgent. C’est très cohérent en termes d’économie, de transition énergétique et de mobilité. C’est aussi prendre conscience que les villes changent et que les pouvoirs publics doivent s’adapter aux nouvelles habitudes des habitants qui veulent bouger rapidement et en toute sécurité sans se soucier d’un problème de parking ou d’embouteillage. Aujourd’hui, le choix est simple, nous pouvons soit continuer à discuter de débats intéressants mais non essentiels, soit décider de monter dans le wagon de la modernité.
David WEYTSMAN – Député bruxellois – Chef de groupe MR au Conseil communal de Bruxelles-Ville
Gautier CALOMNE – Député fédéral – Chef de groupe MR au Conseil communal d’Ixelles
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