Ludivine Dedonder: « La Défense doit s’adapter au nouvel environnement géostratégique »
Ludivine Dedonder met en place un « comité stratégique » de douze experts chargés de définir les nouvelles menaces auxquelles la Belgique sera confrontée d’ici à 2040. Entretien avec la ministre de la Défense, qui nous dévoile le projet.
Renforcement des menaces dans le cyberespace, zones proches de l’Europe déstabilisées (Sahel, Proche-Orient…), enracinement et dissémination du terrorisme djihadiste, dérèglements climatiques, pandémies… Le contexte stratégique est en dégradation rapide et durable. C’est pourquoi l’accord de gouvernement de la coalition Vivaldi a prévu d’actualiser la « Vision stratégique » de la Défense et la loi de programmation militaire, qui fixe les investissements nécessaires en équipement et en matériel. Elaborés en 2014 et adoptés en 2016, ces deux documents répondent à un environnement géostratégique qui a évolué depuis lors. Ludivine Dedonder (PS), la nouvelle ministre de la Défense, nous a accordé un entretien au moment-même où elle lance la toute première phase de cette actualisation.
Concrètement, quand ferez-vous aboutir l’adaptation de la « Vision stratégique » de la Défense ?
Dès la deuxième quinzaine de janvier, un groupe d’experts se réunira une fois par semaine pour définir le cadre sécuritaire prospectif dans lequel la Défense opérera à l’avenir. Ce « comité stratégique » devra fournir un premier rapport en juin. Il contiendra une analyse de l’environnement stratégique à l’horizon 2030-2040 et exposera la raison d’être des forces armées en Belgique au XXIe siècle et les objectifs qu’elles sont amenées à remplir. J’ai voulu que ce panel de spécialistes issus du monde académique soit le plus large possible. Toutes les personnes sollicitées ont accepté de participer au projet. Leurs compétences respectives couvrent l’ensemble des domaines qui nous intéressent : il y a des spécialistes de zones géographiques particulières, comme l’Afrique et l’Asie, mais aussi des experts de matières transversales, comme le terrorisme ou le changement climatique. La parité linguistique est respectée et j’ai tenu à ce qu’il y ait, parmi les dix experts, autant de femmes que d’hommes. S’y ajoutent deux coordinateurs, un civil et un militaire, chargés d’animer et de piloter les travaux : le professeur de l’UCLouvain Tanguy Struye de Swielande, spécialiste en géopolitique et politique étrangère des grandes puissances et dans l’analyse de la prise de décision, et le colonel Eric Kalajzic, chef de la chaire de politique mondiale de l’Ecole royale militaire.
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Quelle sera la suite des opérations ?
Je présenterai à la rentrée une version actualisée de la Vision stratégique. Elle s’appuiera sur le rapport des experts et servira à élaborer une nouvelle loi de programmation militaire. Nous sommes contraints d’anticiper nos choix longtemps à l’avance, vu le temps qui s’écoule entre la décision d’acquérir du matériel militaire et sa mise en service dans les composantes de l’armée. Un débat parlementaire sur le document produit aura lieu. Je vise pour septembre l’actualisation de la Vision stratégique et l’adaptation de la loi de programmation militaire à l’horizon 2030. Dans un second temps, l’objectif sera d’élargir l’horizon stratégique jusqu’à 2040, car il faut préparer les crises et conflits du futur et acquérir la technologie qui permet d’avoir un temps d’avance sur les rivaux et adversaires potentiels. Les connaissances des douze experts permettront de comprendre les menaces qui se profilent et d’investir au mieux dans des moyens de défense pour que la Belgique puisse mieux garantir la sécurité de chaque citoyen belge. Les cyber-menaces n’ont pas été prises en compte dans la Vision stratégique de 2014.
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