Paul Magnette avec Bart De Wever lors de leur mission royale. © Belga

Les francophones ne savent pas vraiment ce qu’ils veulent pour l’avenir de la Belgique (analyse)

Olivier Mouton Journaliste

Entre belgicanisme nostalgique, relations compliquées communautaristes- régionalistes et rattachisme utopique, il n’y a guère de cohérence.

La Belgique est à un tournant, d’ici le 17 septembre, date à laquelle le gouvernement Wilmès devrait réclamer la confiance à la Chambre. Faute de solutions, on irait tout droit vers les élections. « Je le dis très calmement et très sincèrement: nous devons réfléchir à la manière de construire encore un avenir commun, soulignait ce matin Rudi Vervoort (PS), ministre-président bruxellois. Nous sommes un peu à la croisée des chemins. »

Rudi Vervoort a une nouvelle fois regretté, sur la RTBF, l’image négative de Bruxelles aux yeux de la Flandre: « On a l’impression qu’il faut montrer qu’à Bruxelles ça ne va pas bien, surtout dans la presse néerlandophone ». Les discussions entre la N-VA et le PS? « On était loin d’un projet abouti », assène-t-il. Son collègue de parti Ahmed Laaouej, chef de groupe à la Chambre, se montre quant à lui optimiste de la possibilité d’aboutir rapidement, sans la N-VA plus que probablement. Mais après?

Olivier Maingain, ancien président de DéFi, se fend lui d’une carte blanche dans les colonnes du Soir. Son titre est éloquent: « De l’impossibilité de former un gouvernement fédéral à l’impossibilité de la Belgique? ». Il dénonce « le manque de constance » des présidents de partis francophones dans leur quête d’alliance pour former un gouvernement – une allusion au revirement du PS dans son dialogue avec la N-VA – et souligne: « Il faudra avoir le courage de poser les vraies questions sur l’avenir du pays« .

Or, les francophones sont bien démunis sur le sujet, alors que la N-VA sait où elle veut aller. « Nous devons avoir l’honnêteté de reconnaître, écrit-il, que les francophones sont au mieux conscients de la nécessité de préparer le rendez-vous institutionnel, mais indigents quant à à la façon de l’assumer, au pire dans le déni d’une réalité qui, pour certains semble les dépasser ».

C’est loin d’être faux. Entre belgicanisme nostalgique, relations compliquées communautaristes-régionalistes et rattachisme utopique, il n’y a guère de cohérence. Certains proclament leur attachement profond à la Belgique, sans toujours se soucier des désirs autonomistes flamands. D’autres s’accrochent à une « coquille vide » belge pour des raisons financières, en désirant plus ou moins secrètement s’en aller, en raison des dérives extrémistes du Nord du pays. « Les approches ethnico-linguistiques sont dépassées depuis longtemps: l’ambition francophone n’a jamais existé et n’existera jamais, réagit Philippe Destatte, de l’Institut Destrée. Et c’est tant mieux. Laissons place à des territoires de citoyennetés, multiculturels et créatifs. Et laissons là les momies et les poules… »

Peut-être, mais il est parfois préoccupant de voir que les partis francophones n’accordent plus leurs violons, alors que les velléités flamandes s’expriment fortement. Joëlle Milquet, ex-présidente du CDH, s’inquiète régulièrement du fait que les présidents francophones ne se réunissent plus jamais.

https://twitter.com/PhD2050/status/1298522531834613760Philippe Destatte 😷https://twitter.com/PhD2050

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L’avenir du pays est au coeur des négociations pour la formation d’un gouvernement fédéral, sans que cela ne soit dit ouvertement. La formation d’un arc-en-ciel ou d’une Vivaldi – sans majorité néerlandophone – permettrait sans doute de mettre en place un « projet positif pour la Belgique » (en reprenant l’expression des écologistes). Mais ce serait aussi, peut-être, une façon de reculer pour mieux sauter en 2024. Une alliance N-VA / Vlaams Belang ne serait pas à exclure, mettait en garde l’ancien secrétaire d’Etat nationaliste Theo Francken.

La peur est toujours mauvaise conseillère, c’est une évidence. Mais la conscience que la Belgique est un couple de deux grandes communautés ne doit néanmoins pas être négligée. De même la faculté de réfléhir l’avenir au-delà de l’urgence: elle s’impose, plus que jamais.

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