Etienne Dujardin
Le programme d’Ecolo, le contraire de ce que veulent les classes moyennes ?
On commence réellement à parler du fond dans cette campagne électorale et c’est tant mieux pour la vitalité de notre démocratie. Les derniers sondages montrent qu’Ecolo a le vent en poupe.
Ecolo a souvent suscité de grosses attentes et de grosses déceptions de l’électeur. En 1999, Ecolo obtient sa première grande victoire électorale grâce à la crise de la dioxine et s’effondre électoralement en 2003. Ecolo remonte ensuite dans les années qui suivent, résultat en 2014 : une nouvelle grosse défaite électorale notamment due à la gestion des panneaux photovoltaïques par Jean-Marc Nollet, dossier qui aura coûté des centaines de millions d’euros à la région wallonne. En 2019, le thème du climat remplace celui de la dioxione et Ecolo obtient à nouveau de bons scores dans les sondages. Le risque pour Ecolo serait que la campagne s’élargisse à d’autres sujets que le climat comme ceux du socio-économique, de l’immigration, de l’enseignement, trois thèmes qui pourraient faire fuir massivement les électeurs potentiels du parti vert.
Personne n’est contre le climat ou la défense de l’environnement, mais il y a des visions différentes pour atteindre cet objectif. Il y a une écologie optimiste, qui croit que les défis peuvent être relevés par l’innovation technologique, par l’investissement pour atteindre nos engagements environnementaux et sociaux. Puis il y a l’écologie punitive qui pense que c’est en étant anticapitaliste, en prônant la décroissance, en proposant un programme qui fait perdre de l’emploi ou en taxant la viande que la Belgique va sauver l’univers.
Au niveau socio-économique, le programme d’Ecolo est peut-être plus à gauche que le PS. Même son partenaire Groen se distancie de différentes mesures comme celle de la semaine de 4 jours en gardant le même salaire, ou celle de laisser les grévistes empêcher ceux qui souhaitent aller travailler librement de pouvoir le faire. La taxation sur le kérozène appliquée hors cadre européen ne ferait que frapper inutilement la classe moyenne et créerait un drame social notamment dans nos aéroports comme celui de Charleroi. Le Bureau du Plan, organisme indépendant, a évalué la semaine dernière, les différentes mesures des partis. Pour Ecolo, c’est une baisse des revenus disponibles des particuliers de 1,31%, 6,6 milliards de taxes supplémentaires et 2.240 emplois en moins. Ecolo est le seul parti francophone dont les mesures font perdre de l’emploi selon le bureau du plan, et c’est le seul parti qui est contre le fait de réduire le taux des droits de successions. Les travailleurs et la classe moyenne apprécieront.
En matière d’enseignement, il serait intéressant de voir si Ecolo souhaite à terme supprimer l’enseignement libre. On se souvient d’Emilie Hoyos, ancienne co-présidente Ecolo traiter l’enseignement libre de « scorie du passé ». Ecolo veut aujourd’hui « organiser l’offre scolaire non plus sur un mode concurrentiel mais par bassin de vie« , Ecolo veut changer le rythme scolaire de la journée et agrémenter cette dernière par des activités extras-scolaires qui doivent évidemment être gratuites pour Ecolo. Avant de proposer l’extra-scolaire, et de faire des changements de rythme, le rôle de l’école est de se concentrer sur le scolaire et la transmission des savoirs de base.
Concernant l’immigration et la lutte contre le communautarisme, là aussi, le programme d’Ecolo est l’un des plus à gauche possible. Le préambule du programme du parti à ce sujet commence par indiquer que c’est le fantasme de la droite alors qu’il s’agit de la première priorité des citoyens dans tous les eurobaromètres. Toutes les mesures contenues dans le programme d’Ecolo faciliteront la migration. Ecolo propose même une nouvelle régularisation de migrants, un nouveau statut, celui de « réfugié climatique ». Ecolo fait le lien entre aide aux pays en développement et respect du climat ce qui est bien mais ne fait évidemment aucun lien entre aide aux pays en développement et coopération dans le retour des migrants économiques clandestins. On notera l’absence de mesures pour renforcer la lutte contre le radicalisme islamiste. Au contraire, Ecolo exige (de nouveau contrairement à Groen) le retour en Belgique des combattants nationaux de Daech. Pas un mot non plus, pour les mesures anti-terrorisme, à part pour les critiquer car elles seraient « prises sous le coup de l’émotion« . Au niveau du communautarisme Ecolo va aussi plus loin que le PS, en autorisant le Burkini dans les piscines et le voile dans les administrations. Dans La Capitale du 29 avril, un candidat Ecolo fait le lien entre lutte décoloniale et lutte contre le changement climatique, et demande de retirer les statues de Leopold II. Il faudra nous expliquer en quoi retirer les statues de Leopold II changera quoi que ce soit au réchauffement climatique.
Il reste un mois pour que chaque électeur puisse comparer les programmes et les projets de sociétés. La classe moyenne qui souhaite vivre dignement de son travail,qui aspire à une école de qualité pour nos enfants sera la clef de ce scrutin. Deux projets de société vont s’affronter. Espérons que beaucoup de débats aient lieu programme contre programme dans les prochaines semaines, pour que l’électeur puisse éclairer sa lanterne et choisir en conséquence.
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