Joachim Coens, président du CD&V. © Belga

La Vivaldi évite la crise d’emblée: le président du CD&V, « très contrarié », apaisé par les préformateurs (analyse)

Olivier Mouton Journaliste

Joachim Coens (CD&V) estimait des engagements trahis. Une réunion a levé le malentendu. Mais la méfiance est de mise. La nervosité grandit autour du nom du formateur ou de la formatrice. Et les nationalistes flamands sont très virulents.

Le CD&V, qui avait décidé de « donner une chance » à la Vivaldi la semaine dernière, s’est déjà cabré ce lundi. « Nous avons conclu des accords clairs la semaine dernière sur un certain nombre de questions que nous voulons voir résolues d’une certaine manière, affirmait ce matin son président Joachim Coens, et je n’ai pas l’impression que ce soit le cas pour le moment. Je suis très contrarié par cette situation. » Cinq heures plus tard, il a reçu ses apaisements. Mais l’incident est révélateur de la nervosité qui prévaut au sein des sept partis engagés dans la négociation.

Le numéro social-chrétien ne précisait pas ce qui le contrariait, mais on sait que ses « lignes rouges » concernent la réforme de l’IVG qui se trouve sur la table du parlement, la nécessité d’avancées institutionnelles, le respect de balises budgétaires et, sans que cela ne soit dit ouvertement, l’attribution du Seize. Au sein du CD&V, la tonalité allait d’une « petite crisette » à la volonté de se retirer du processus de fomation, selon le Tijd. Le parti est fortement déchiré sur cette participation, notamment au niveau de ses élus locaux.

A l’issue du bureau de son parti, Joachim Coens a refusé d’en dire davantage. Visiblement contrarié, il a seulement précisé aux journalistes présents qu’il allait avant tout faire rapport aux préformateurs, Egbert Lachaert (Open VLD) et Conner Rousseau (SP.A). Quatre points de la note étaient contestés parce que « contraires à ce qui avait été convenu ». Les préformateurs parleraient d’un « malentendu » et seraient prêts à en discuter. Rien d’insurmontable, a priori, mais cela témoigne d’une confiance très faible entre les partenaires. Sur fond, relate le Standaard, de coups de téléphones ratés entre présidents de parti, ce lundi matin.

Finalement, lundi en fin d’après-midi, à l’issue de la rencontre voulue avec les préformateurs, il a été décidé de poursuivre les discussions. Le parti de Joachim Coens ne tirera pas la prise, pour l’instant du moins.

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Le contexte électrique des derniers jours, avec le débat tendu sur le poste de Premier ministre et les attaques virulentes de la N-VA et du Vlaams Belang n’ont toutefois pas aidé. Ce lundi matin, l’extrême droite a manifesté devant le siège du CD&V en traitant le parti de « torchon de la rue de la Loi ».

L’incident fut donc plutôt une dramatisation de dernière minute qu’un incident majeur de nature à faire échouer d’emblée la Vivaldi. Mais il est révélateur de la méfiance qui prévaut en son sein.

Le Seize pour « Sophie »

La crise sociale et économique est pourtant à nos portes. « Une entreprise sur cinq est en risque de faillite », mettait en garde ce lundi matin Pieter Timmermans, administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB). Pourtant, ce qui a dominé le débat politico-médiatique, ce week-end, ce n’est pas un débat de fond sur les mesures de relance, mais bien les déclarations relatives à l’attribution du poste de Premier ministre, avec un Georges-Louis Bouchez (MR) faisant campagne pour Sophie Wilmès. Et l’amertume revancharde de Bart De Wever, président de la N-VA.

L’ordre des priorités laisse rêveur.

Il s’agit, il est vrai, d’une nouvelle semaine décisive pour la coalition Vivaldi/Avanti, (alliant les familles socialiste, libérale, écologiste, avec le CD&V). La priorité du duo de préformateurs Egbert Lachaert (Open VLD) – Conner Rousseau (SP.A) consiste à déblayer le terrain pour la nomination aussi rapide d’un ou d’une formateur.trice, traditionnellement destiné à prendre ensuite les clés du Seize. Les déclarations relatives aux noms s’expliquent donc : le PS Paul Magnette s’est dit ouvert au Seize et en rêve en tant que président du premier parti et de la première famille de la coalition, les partis flamands pourraient le revendiquer pour combler le déséquilibre de leur absence de majorité linguistique et le MR défend le bilan populaire de sa « Sophie ».

Ce choix est important pour aller de l’avant dans cette formation gouvernementale, elle-même vitale pour la relance socio-économique. Patience, donc. L’argumentation du président du MR consiste à dire que le gouvernement penchera à gauche et que, dès lors, un Premier ministre libéral permettra de compenser. Cela témoigne de l’autre débat sous-jacent qui consistera à équilibrer les priorités de la relance. Au plus vite on tranchera le Seize, ces prochains jours, au plus vite on pourra avancer.

Mais en attendant, on lave son linge sale en public et cela donne à nouveau une piètre image du débat politique, créant l’impression d’un monde obsédé par son nombril.

Les attaques de la N-VA

L’amertume de la N-VA, quant à elle, est féroce, liée à la perspective d’être rejetée de la majorité fédérale, alors que le dialogue avec le PS était enfin enclenché et qu’il promettait des avancées institutionnelles. Le président du MR est particulièrement pris pour cible en raison de ses sorties ‘belgicaines’ et de l’axe qu’il a composé avec les écologistes pour mettre fin au rêve nationaliste. Ce week-end, Bart De Wever a estimé que la Vivaldi serait « une catastrophe pour la Flandre et ironiquement proposé de mettre en place une circonscription électorale fédérale qui permettrait à son parti de conquérir tout le pays – un rêve cultivé par les libéraux.

Nouvelle salve ce matin avec Cieltje Van Achter, vice-présidente de la N-VA, à la radio : « Ce n’est pas démocratique, ce pays ne fonctionne plus ». Refrain connu.

https://twitter.com/FranckenTheo/status/1302840949224148992Theo Francken MPhttps://twitter.com/FranckenTheo

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Le secrétaire d’Etat Theo Francken (NV-A) et Georges-Louis Bouchez se sont quant à eux écharpés sur Twitter comme un révélateur de cet état d’esprit nerveux. Le premier, cinglant : « Les ministres MR étaient si bons sur le fond que six ans après, personne ne les connaît et aucun ne parle néerlandais ». Le second réplique : « Les ministres MR ont travaillé et travaillent toujours pour le pays », alors que la N-VA a fui ses responsabilités en quittant le gouvernement Michel « sur un thème qui constitue le thème central de l’extrême droite et qui l’a fait progresser. » Boum. A un CDH qui trouve le débat sur le Seize « indigne », le libéral évoque une nécessité de transparence dans le débat.

Pendant ce temps, l’alarme économique retentit…

Précision importante : la collaboration entre les partis de la Vivaldi et la N-VA restera cruciale pour coordonner le plan de relance entre le gouvernement fédéral, s’il voir le jour, et l’exécutif flamand dominé par les nationalistes.

Conclusion annexe: après le déblocage de la fin de la semaine dernière, il serait préjudiciable que la nouvelle majorité se déchire sur des questions de personnes ou de méfiance chronique, alors que l’urgence socio-économique devient de plus en plus criante. A titre de référence, la France a déjà présenté un ambitieux plan de relance la semaine passée.

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