Inondations en Wallonie: « Indemniser les non-assurés, c’est du populisme »
Etienne de Callataÿ, économiste chez Orcadia, est très critique au sujet de l’attitude du gouvernement wallon d’Elio Di Rupo.
Elio Di Rupo (PS), ministre-président wallon, a confirmé ce jeudi matin que son gouvernement indemniserait toutes les victimes des terribles inondations du mois de juillet, y compris celles qui n’étaient pas assurées. Etienne de Callataÿ, économiste chez Orcadia, critique cette volonté, et se pose des questions plus larges.
Que vous inspire cette volonté d’indemniser les non-assurés?
Je la regrette. Il n’y a pas de raison que l’on décourage les personnes de s’assurer en démontrant qu’en cas de grosse crise, tout le monde sera assuré, que l’on soit assuré, mal assuré ou pas du tout.
Ce serait donc un mauvais signal?
Cela déséquilibre complètement le système, oui. Pourquoi chercherais-je à m’assurer complètement si, en cas de gros sinistres, je sais de toute façon que les pouvoirs publics interviendront?
Je ferais une exception à cela, pour les personnes dans le besoin. Mais tous ceux qui sont mal assurés ou non assurés, par négligence ou par choix, je ne vois pas pourquoi on les soutiendrait.
Cela me fait penser à ceux qui font le calcul de ne pas s’assurer et qui pratiquent l’auto-assurance: par exemple, lorsque l’on décide de ne pas assurer son vélo en mettant un gros cadenas, en sachant que le pouvoir public le remboursera en cas de vol. Je sais que l’on parle ici de plus gros montants, mais le principe est le même.
Comment déterminerait-on ceux qui sont « dans le besoin »?
De la même manière que les personnes peuvent bénéficier d’une intervention du CPAS. On pourrait contrôler cela avec les revenus, mais aussi le patrimoine: un châtelain sans revenu, mais disposant d’une propriété importante, n’entrerait pas en ligne de compte.
Comment qualifieriez-vous cette indemnisation des non-assurés? Du populisme?
C’est effectivement une forme de populisme. Le populisme, c’est la démagogie, c’est ne pas oser dire des choses désagréables aux citoyens. Cela donne l’impression que l’argent tombe du ciel ou que l’on peut aller chercher les montants dans les poches des riches. Le résultat, c’est quand même que la collectivité et la classe moyenne payera la facture.
L’attitude du gouvernement wallon me pose deux autres questions.
Tout d’abord, l’intervention des assureurs est plafonnée jusqu’à 350 millions, montant au-delà duquel la Région doit intervenir. Dans le cadre des nouvelles répartitions de compétences sur le Fonds des calamités, la Région wallonne aurait dû provisionner un montant en cas de catastrophe pour financer cela, ce qu’elle n’a pas fait en trichant avec le budget. mais au-delà, on annonce aujourd’hui des négociations avec le secteur des assurances pour relever ce plafond. Avec quelle transparence? J’aimerais connaître la contrepartie et, en tant que citoyen, j’estime être en droit de le savoir. C’est étonnant qu’une majorité dans laquelle se trouve Ecolo, qui a fait de la transparence son cheval de bataille, agisse de la sorte.
Deuxième question: à partir du moment où il y a un plafond à partir duquel les assureurs savent que les pouvoirs publics interviendront, ne seront-ils pas tentés d’être généreux dans leur intervention? Que le montant soit de un ou deux ou trois milliards, l’indemnisation est garantie. Je connais déjà un cas d’une chaudière qui aurait pu être réparée, mais qui va être remplacée.
Cela fait tourner l’économie, non?
Oui, mais j’aimerais autant faire tourner l’économie circulaire. Je crains que cela ne mène à des dérapages. Je me demande: quels sont les mécanismes mis en place par la Région wallonne pour éviter que les montants ne soient plus élevés qu’ils ne devraient l’être?
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