Pierre Havaux
Et la Flandre dans tout ça? Pact 2020, pas le top, juste un flop (chronique)
En 2009, la Flandre ambitionne de sortir par le haut de la crise bancaire et se mobilise autour de vingt objectifs et de quelque deux cent indicateurs: le Pact 2020. Onze ans plus tard, le Pact 2020 a gaspillé du temps, de l’énergie et des moyens à courir trop de lièvres à la fois.
Atteindre le haut de l’affiche et s’y maintenir. Figurer parmi les cinq meilleurs de la classe régionale européenne, et dans toutes les matières encore bien: économique, sociale, écologique, sociétale. Ne plus avoir à entendre parler de dette publique et encore moins de pauvreté. Un rêve, une folie des grandeurs? Impossible ne peut être flamand. C’est l‘avenir radieux que promettaient pour 2020 à la Flandre Kris Peeters (CD&V) et son premier gouvernement (CD&V – N-VA – Open VLD – SP.A).
Nous sommes en 2009, le défi ainsi lancé ambitionne de sortir par le haut de la crise bancaire qui malmène durement les économies, il se veut comme le coup d’envoi d’un nouveau départ. De A comme Arbeid pour travail à Z comme Zorg pour soins, en passant par la recherche et l’innovation, l’énergie, le taux d’emploi, l’environnement ou encore la lutte contre la pauvreté, le gouvernement flamand se donne une décennie pour propulser le nord du pays dans le top 5 des régions d’Europe les plus performantes. Les forces vives de la nation sont invitées à se mobiliser autour de vingt objectifs, à s’aligner sur quelque deux cents indicateurs compilés dans un catalogue au titre sobre mais qui claque au vent: Pact 2020. Rendez-vous était donc pris.
Pact 2020 a gaspillu0026#xE9; du temps, de l’u0026#xE9;nergie et des moyens u0026#xE0; courir trop de liu0026#xE8;vres u0026#xE0; la fois.
2020. On y est et on avait entre-temps un peu, beaucoup, perdu de vue le beau challenge. Mais pas le think tank Itinera qui avait bien noté l’échéance dans son agenda et a envoyé l’un de ses économistes aux nouvelles. Simon Ghiotto a fait l’inventaire: « De manière générale, la Flandre n’a pas concrétisé les ambitions de 2009. » A peine sept objectifs atteints à l’échéance convenue, deux autres à deux doigts de l’être. Exportations et investissements à l’étranger, taux d’emploi des + de 50 et + de 55 ans, Pact 2020 a su tenir quelques promesses. Mais pour le reste, « la part des enfants nés dans des familles pauvres n’a pas diminué de moitié mais a doublé, nous attendons plus longtemps dans la file pour consulter un psychologue, l’emploi des peu scolarisés a continué de baisser, tout comme l’employabilité des travailleurs et la confiance dans les institutions politiques flamandes ».
Bonnes intentions, mauvaise approche. A force de placer la barre très ou trop haut, Pact 2020 a gaspillé du temps, de l’énergie et des moyens à courir trop de lièvres à la fois. Le suivi du plan a rapidement disparu des radars, et de contrôle « indépendant » du respect des consignes il n’a jamais été sérieusement question. « Dresser une liste de voeux ne fait pas une stratégie. Lorsque tout devient prioritaire, plus rien ne l’est« , commente le chercheur.
La dispersion, voilà le péché mignon. Un travers dans lequel s’était déjà fourvoyé Vlaanderen in Actie, cet autre grand plan tourné vers le futur, porté en 2006 par le prédécesseur de Kris Peeters à la tête du gouvernement flamand, Yves Leterme (CD&V), et qui avait, lui aussi, fait naufrage pour n’avoir pas su dépasser le stade du projet de prestige et du bric-à-brac sans véritable consistance. La patrie de Flanders Technology, grand-messe et vitrine de la technologie flamande qui fit la fierté du nord du pays dans les années 1980 et 1990, peine décidément à récidiver dans le bouclage des chantiers de longue haleine.
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