Didier Gosuin, portrait d’un atypique
Hyperactif et inquiet, le bourgmestre FDF d’Auderghem, fraîchement (re)nommé ministre bruxellois, aura passé toute sa vie dans un milieu politique qu’il déteste. Son indignation à fleur de peau est, il est vrai, peu compatible avec le sérail.
Didier Gosuin se méfie du monde politique. Ce n’est pas le moindre des paradoxes de cet homme timide mais populaire qui, au dernier scrutin, fin mai, a récolté 22 906 voix de préférence : convivial dans la vraie vie, il est difficile à dérider dès qu’il travaille ; adepte d’un discours franc, il reste, sur le fond, parfaitement hermétique ; contraint de fréquenter le beau monde bruxellois, il le fuit dès qu’il peut, mal à l’aise qu’il est dans un milieu qu’il n’aime pas. Un petit mystère à lui seul.
Car du sérail politique, Didier Gosuin, 62 ans, déteste tout, ou à peu près : les jeux de rôles, l’hypocrisie, les privilèges. Seuls les chocolats que Laurette Onkelinx lui a offerts en guise de cadeau d’anniversaire, le 9 juillet, pendant les négociations, ont dû trouver grâce à ses yeux. Et encore… « La politique est une chose sérieuse, affirme-t-il. Or on y joue beaucoup la comédie. On peut me reprocher de cracher dans la soupe quand je dis ça. Mais je ne m’y retrouve que parce que cet outil de pouvoir me permet de changer la société. »
Assis sur le siège en cuir de son bureau, Didier Gosuin a le verbe trop vif et trop fort pour cacher qu’il est révolté. « La société est amorphe et injuste. Il faut lui foutre le pied au cul pour qu’elle change. Et pour cela, on doit garder une part de révolte. »
Son indignation puise ses racines dans un milieu familial aride. Né au coeur d’un modeste foyer qui compte quatre enfants, Didier Gosuin a conservé de son père l’image d’un homme (francophone) amer et meurtri par la vie, empêché d’étudier du fait de son enrôlement dans l’armée, au début d’une guerre dont il est en outre revenu blessé. Son épouse, néerlandophone, est infirmière et travaille de nuit : Didier la voit (trop) peu.
Titulaire d’un régendat en français et histoire, il décroche ensuite une licence en sciences du travail. Il enseigne quelques années avant de lancer une société de vente de pralines et un bureau de comptabilité. Mais le virus de la politique le tient. Cet amoureux de Bruxelles porte les couleurs du FDF, qu’il considère comme le seul parti urbain à l’époque et qui, surtout, ne fait pas de l’idéologie une obsession. « Je n’aurais jamais pu entrer dans un parti traditionnel, où l’on doit obéir le doigt sur la couture du pantalon », assure-t-il. Mais son arrivée dans la maison amarante n’est pas simple. Il lui faut neuf ans pour intégrer le bureau politique permanent du FDF. « Mon parti ne m’a jamais reconnu, parce que je ne faisais partie d’aucun clan. Je me suis imposé. Cette galère m’a meurtri mais formé. J’ai fini par faire moi-même mon trou, en revendiquant mon indépendance vis-à-vis de tous. Il n’y a rien de pire que de figer les gens dans des bocaux avec de la naphtaline. Mais la politique fonctionne beaucoup avec des bocaux. Et avec des tiroirs. Finalement, c’est un monde d’apothicaires. »
L’intégralité du portrait dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec : – « On peut vite le décevoir, parce qu’il est très exigeant » – « Didier est plus un gestionnaire qu’un innovateur » – « Son rapport à l’argent est presque protestant » – « Il croit toujours que les autres sont mieux armés que lui » – « Il considère que les relations humaines sont une perte de temps » – « Il faudra voir s’il peut prendre des risques
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