Covid : quelle fiabilité pour les tests rapides ?
L’agence fédérale du médicament (AFMPS) recommande des tests antigéniques en se référant simplement à la notice du fabricant. Pour l’un de ces tests, deux études françaises donnent des résultats bien différents que ceux pris en compte par l’AFMPS. Interpellant.
Comme le journal Le Soir l’explique ce 7 novembre, l’AFMPS a récemment publié un liste de 12 tests rapides antigéniques « recommandés », donc remboursables. Ces tests rapides sont destinés à venir compléter l’arsenal des tests PCR traditionnels. Ils ont l’avantage de donner un résultat rapide. On peut savoir en moins de vingt minutes si l’on est positif au covid. De nombreux kits ont envahi le marché. L’AFMPS a donc décidé de prendre la main, une fois de plus, et a publié la liste de ses « recommandations ». Ceux qui ne font pas partie de la liste ont donc peu de chances de recevoir des commandes.
Or les tests antigéniques repris sur la liste de l’agence fédérale sont-ils vraiment performants ? Ils n’ont, en tout cas, pas été scientifiquement validés avant d’être recommandés. L’AFMPS s’est simplement basée sur les données des IFU, soit les notices des firmes pharmaceutiques qui les ont produits. Sur le tableau Excel de l’AFMPS, la sensibilité (soit en gros, leur fiabilité) des 12 tests dépasse 90 %. Certains atteignent même 97 %, soit une performance identique à celle de tests PCR classiques. Etonnant. Plusieurs labos de biologie clinique affirment que c’est techniquement inconcevable.
Ils semblent avoir raison. Pour l’un de ces tests antigéniques, celui de la firme Abbott, nous avons trouvé deux évaluations réalisées par des laboratoires français : le labo de virologie de l’Ecole supérieure de Lyon, à la demande de l’Agence régionale de santé, et le labo des Hôpitaux universitaires de Marseille du célèbre Pr Didier Raoult. Les résultats de ces évaluations sont bien moins positifs que celui sur lequel l’AFMPS s’est basée pour ses recommandations, soit une sensibilité de 93.3 %. A Marseille, le test Abott affiche une sensibilité de 75 %, à Lyon de 53,5 % (un patient sur deux positif au PCR n’a pas été détecté avec l’antigène). Le labo de Lyon spécifie que le défaut de sensibilité est sans doute du au fait que le dépistage a été réalisé pour de nombreux cas de l’échantillon après sept jours. Cela fait tout de même une solide différence avec les performances annoncées dans le IFU.
Qui a raison ? Il est plus que probable qu’Abbott, comme les autres firmes, ait effectué sa propre évaluation dans les meilleures conditions avant de rédiger leur notice. On ne peut le lui reprocher. D’où l’importance de valider ces tests par ailleurs, comme cela se fait habituellement. Sciensano enjoint d’ailleurs les labos cliniques à vérifier les tests que l’AFMPS recommande. Mais alors, pourquoi établir cette liste de produits recommandés remboursables, avant d’avoir les évaluations des labos cliniques ? L’urgence n’est pas un argument convaincant, en l’occurrence. Plusieurs firmes écartées, dont la gembloutoise Coris, qui produit ses tests en Belgique, ne comprend pas la logique de l’agence. Elle n’est pas la seule…
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