Covid: ne plus fermer les écoles, coûte que coûte
Les pédiatres ne cessent d’alerter. Les écoles ne doivent plus fermer, la vie scolaire doit reprendre son cours de la manière la plus « normale » possible. Il en va de la santé mentale des enfants et des adolescents.
La montée en flèche des infections ces derniers jours ravive déjà les craintes. D’autant que, contrairement à la deuxième vague, les chiffres des contaminations sont plus élevés dans l’enseignement primaire que dans le secondaire, bien que cette réalité soit en partie due au durcissement des protocoles de tracing et de testing. Le rapport du RAG – le Risk assessment group – du 3 novembre relevait que la majorité des clusters étaient identifiés dans les crèches et les écoles, avant le lieu de travail. Raison pour laquelle le masque est redevenu la règle pour les élèves du secondaire en Wallonie (il l’était déjà à Bruxelles ; la Flandre, elle, ne l’impose qu’aux 5e et 6e primaires mais pas en secondaire, car les 12-17 ans sont largement vaccinés).
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Au cabinet de la ministre de l’Education, Caroline Désir (PS), on livre une analyse prudente de la situation pour la Fédération Wallonie-Bruxelles: « Il faut rappeler que la rentrée de septembre s’est bien passée et n’a pas provoqué de rebond épidémique. […] Ce n’est qu’à partir du 10 octobre que la tendance s’est dégradée et on peut difficilement considérer que c’est lié à l’activité scolaire. En effet, rien n’avait changé dans les normes scolaires en FWB depuis le 1er septembre, contrairement à la Flandre. Bien que moins clément, le temps est resté doux début octobre et n’empêchait nullement le respect des mesures d’aération dans les classes. Il faut donc clairement regarder ailleurs, peut-on lire dans une note qui nous a été transmise. A partir de là, l’augmentation des cas a néanmoins été rapide et significative. Elle a à nouveau fortement compliqué la tâche des directeurs d’établissement. »
A ce stade, insiste-t-on au cabinet de la ministre, il est « inconcevable de revenir à l’hybridation dans l’enseignement secondaire, d’aller plus loin que l’an dernier en termes d’obligation du port du masque ou d’appliquer aux enfants des règles plus dures qu’aux adultes. » Pour la ministre, l’obligation du port du masque en primaire apparaît comme un choix de société et non comme une décision fondée sur des arguments scientifiques.
Un stade qui semble pourtant déjà dépassé. Pour les experts du Gems, l’importance de la transmission chez les jeunes justifie que l’on impose aux écoliers le port du masque dès 9 ans, en classe comme dans tous les autres lieux où il est obligatoire. Un avis que partage le ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke.
Pour Christelle Meuris, infectiologue au CHU de Liège et membre du Gems, se couvrir le nez et la bouche reste l’une des barrières les plus efficaces contre le virus, quel que soit l’âge. « La transmission dans les écoles est très importante et le port du masque est l’une des solutions qui permettrait aux classes et aux écoles de ne pas devoir fermer en raison de transmissions accrues dues à des clusters. Le port du masque, par ailleurs, transforme les contacts à hauts risques en contact à faibles risques et diminuerait ainsi le nombre d’enfants placés en quarantaine. »
Dans l’enseignement supérieur, on s’interroge davantage sur l’organisation de la session d’examens de janvier prochain. « L’épidémie nous a appris à être prudents, et nous ne pouvons pas présumer de l’évolution de la situation sanitaire d’ici janvier. Mais il faut souligner que les différents retours de terrain dont nous disposons indiquent, jusqu’ici, un bon équilibre entre la nécessaire protection sanitaire et l’organisation des activités dans l’enseignement supérieur, rassure-t-on au cabinet de la ministre Valérie Glatigny (MR), en charge de l’Enseignement supérieur. Sauf imprévu, la session d’examens de janvier devrait donc se dérouler selon les mêmes modalités qu’actuellement, soit en présentiel avec le port du masque dans les espaces intérieurs. »
Les moins de 12 ans, prochaine cible à vacciner
Les laboratoires Pfizer-BioNtech et Moderna prévoient de demander une autorisation urgente de mise sur le marché de leur vaccin pour les 5-11 ans. Plusieurs inconnues demeurent.
L’Agence européenne des médicaments (EMA) a reçu le courrier de Pfizer-BioNtech le 18 octobre. Depuis, elle analyse les données (il faudra attendre au moins quelques semaines), c’est-à-dire qu’elle évalue le rapport bénéfices-risques de ces vaccins chez les 5-11 ans. Les vacciner est-il judicieux?
Il y aurait, d’abord, des bénéfices collectifs. Ouvrir la vaccination aux moins de 12 ans se justifie d’autant plus que le profil des personnes contaminées tend à rajeunir. Depuis plusieurs semaines, les contaminations chez les 7-12 ans restent élevées: elles sont deux fois plus nombreuses que chez les 12-18 ans. Une estimation sous-évaluée, puisqu’ils sont peu testés et souvent asymptomatiques. Rien d’anormal pour autant. Cette tranche d’âge est la dernière au sein de laquelle, hors masques et gestes barrières, le virus se propage sans entrave. « Si on ne vaccine pas, il y aura des poches de population non vaccinées dans lesquelles le virus pourra continuer de circuler et réinfectera des adultes, parce qu’aucun vaccin n’est efficace à 100%, celui-là pas plus que les autres. Donc il y a une vraie justification », relève Pedro Facon, commissaire fédéral au coronavirus, par ailleurs sur la même ligne que son ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke.
Mais des incertitudes demeurent. L’une d’elles concerne l’efficacité des vaccins contre la transmission du virus. On sait que, contrairement aux espoirs initiaux, ils n’abaissent pas à zéro la contagiosité, bien qu’ils la réduisent. Qu’en est-il chez les enfants? A ce stade, c’est l’inconnue. Or, cet élément pèse lourd dans le calcul des bénéfices-risques. On sait aussi que la capacité à s’infecter et à transmettre le virus augmente avec l’âge des enfants et des ados. Désormais, les connaissances actuelles et la dynamique épidémique permettent, en tout cas, de battre en brèche le discours selon lequel les enfants sont peu contaminants et peu contaminés.
En clair, vacciner les moins de 12 ans reste une piste pour étendre la couverture vaccinale et supprimer l’un des derniers réservoirs de circulation du virus.
Les bénéfices individuels, en revanche, sont peu nombreux. Malgré la plus grande transmissibilité du variant Delta, les enfants ont été jusqu’ici épargnés par les formes graves de la maladie, comme souvent dans les cas d’infections respiratoires. Ils peuvent, dans de très rares cas, être sujets à des complications. Depuis le début de l’épidémie, Sciensano recense un peu plus de cent trente cas du syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (Pims, en anglais) post-Covid. Les symptômes (rougeur des yeux, fièvre élevée, éruption, signes digestifs…) avec, dans de nombreux cas, une myocardite aiguë (inflammation du myocarde, principal muscle du coeur). S’ils ont nécessité des hospitalisations, ils évoluent favorablement. Quant aux décès infantiles, ils demeurent extrêmement rares.
Reste la question des effets indésirables. Pour l’instant, il existe peu de données, puisque les essais cliniques sont encore en cours. Les Etats-Unis et Israël ont rapporté un effet indésirable, rare mais documenté, des vaccins à ARN: la myocardite. Elle toucherait davantage les hommes, notamment les 16-19 ans. La fréquence n’est pas précisément connue, variant de 5,5 cas par million de deuxième dose aux Etats-Unis à 21 en Israël. Des travaux récents menés par l’université de Californie signalent, par ailleurs, un nombre plus élevé dans la tranche des 12-15 ans. Qu’en serait-il alors chez les plus jeunes enfants? « Pour un acte qui, en somme, n’a que très peu d’intérêt pour eux, l’innocuité doit être totale. Personne n’accepterait de prendre le moindre risque », prévient Yves Van Laethem, porte-parole interfédéral. Difficile d’affirmer, donc, de quel côté penche la balance.
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