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Corsé, le petit livre rouge du PTB

François Brabant Journaliste politique au Vif/L'Express

Le Vif/L’Express a pu consulter « Le Parti de la révolution », le manuel qui sert de référence théorique aux cadres du PTB. L’un des chapitres s’intitule « rectifier et épurer ». Staline et Mao y sont décrits comme des modèles à suivre. De quoi entretenir le doute : la formation marxiste a-t-elle vraiment changé ?

Le Vif/L’Express a eu accès à l’intégralité des statuts du PTB, ainsi qu’au document adopté par le parti à l’issue de son dernier congrès, en 2008. Sans surprise, le PTB s’y décrit comme « un parti communiste de notre temps ». Il se prononce « pour un appareil d’Etat socialiste », et prévoit de collectiviser à terme « les grandes entreprises, les grandes propriétés foncières, l’agrobusiness, les grands moyens de communication et de transport ». Rien que du classique, dans le chef d’un parti marxiste.

L’article 29.11 des statuts du PTB se révèle plus énigmatique. Celui-ci stipule que « les principes idéologiques et organisationnels pour le travail de cadre ont été fixés par le Ve Congrès dans le manuel Parti de la Révolution ».

Le Parti de la révolution a été rédigé en 1995 par Ludo Martens, le père-fondateur du PTB, décédé en 2011. Il se présente à la fois comme un ouvrage idéologique, exposant les principes fondateurs de la doctrine marxiste et léniniste, et comme un guide pratico-pratique, à destination des cadres du PTB.

Le Vif/L’Express s’est procuré un exemplaire de ce livre qui sert aujourd’hui encore de référence théorique pour les cadres du PTB – du moins si l’on se fie aux statuts du parti.

Son contenu présente un contraste spectaculaire avec la nouvelle image marketing du PTB, consensuelle et débarrassée de ses anciens oripeaux staliniens et maoïstes.

Quelques extraits

Page 16 : Quelques cadres du Comité central 1987-1990 ont capitulé et quitté la direction [du PTB]. Dans le cas le plus grave, il s’agit d’un camarade qui a « découvert » en 1989 qu’il se trouvait en plein accord avec les thèses les plus droitières des révisionnistes et des sociaux-démocrates : contre Staline, contre les Khmers rouges, contre la suppression de l’émeute contre-révolutionnaire à Beijing [place Tienanmen], contre la dictature du prolétariat.

Page 16 : Le parti proclame depuis toujours qu’il base son activité sur les oeuvres de Marx, Engels, Lénine, Staline et Mao Zedong.

Page 23 : Rectifier et épurer. Il faut mener une campagne de rectification parmi les cadres [du PTB], liée à une formation accélérée d’une nouvelle génération de cadre.

Page 26 : Il faut étudier les théories de Marx, Engels, Lénine, Staline et Mao comme une science intégrale couvrant plusieurs vastes domaines : la philosophie, l’économie, la lutte politique et militaire, la culture. (…) Il faut critiquer les théories et politiques bourgeoise ainsi que les théories et politiques réformistes et opportunistes.

Page 30 : Pour une direction bolchevique. L’existence d’un noyau stable de cadres révolutionnaires bien formés est d’une importance décisive pour le développement du parti et pour la victoire de la révolution.

Page 44 : Etudier le marxisme-léninisme, combattre le révisionnisme. Les cadres du parti doivent étudier la théorie marxiste-léniniste comme une science. (…) Pour un parti communiste, il est d’une importance vitale d’étudier les oeuvres de Marx, d’Engels, de Lénine, de Staline et de Mao Zedong ainsi que l’expérience du mouvement communiste international. (…) Les cadres doivent s’efforcer de connaître, dans un délai de quelques années, toutes les oeuvres de base. Celles-ci leur permettront de s’orienter dans la plupart des problèmes qu’ils rencontrent.

* Marx et Engels
– Le Manifeste du Parti communiste
– Socialisme utopique et socialisme scientifique
– Travail salarié et Capital
– Le Capital

* Lénine
– Que faire ?
– Un pas en avant, deux pas en arrière
– Deux tactiques de la Social-Démocratie
– L’Etat et la révolution
– La révolution prolétarienne et le renégat Kautsky
– Le gauchisme, la maladie infantile du communisme
– L’impôt en nature
– De la coopération

* Staline
– Principes du léninisme
– La Révolution d’Octobre et la tactique des communistes russes
– Les questions du léninisme
– Le caractère international de la Révolution d’Octobre
– Questions de politique agraire en URSS
– Pour une formation bolchévique – Rapport au Comité central, mars 1937
– Histoire du PCUS (Bolchevik)
– Rapport au XVIIIe Congrès du PCUS

* Mao Zedong
– Problèmes stratégiques de la guerre révolutionnaire en Chine
– De la pratique
– De la contradiction
– De la juste solution des contradictions au sein du peuple

* Enver Hoxha
– L’histoire du Parti du Travail d’Albanie

Page 46 : L’absence d’efforts dans l’étude du marxisme-léninisme, la passivité et le suivisme sur le plan théorique sont source de révisionnisme. Certains cadres refusent de placer haut la barre pour tout ce qui concerne leur tâche d’étude. Ils évitent soigneusement des tâches théoriques difficiles qui exigent beaucoup d’effort et de travail. En fait, ils manifestent une aversion pour l’analyse politique et, par conséquent, pour la lutte de classes politique.

Page 64 : Réforme et révolution. Sous la dictature de la bourgeoise, en dehors des périodes révolutionnaires, les luttes ont pour but d’arracher des concessions et de défendre des acquis. Dans l’optique communiste, la lutte pour ces réformes doit préparer la révolution future, elle doit développer la conscience révolutionnaire. Un parti communiste mesure les résultats d’une lutte partielle à ces deux questions décisives : a-t-elle fait progresser l’organisation révolutionnaire et a-t-elle fait progresser la conscience révolutionnaire ?

Page 71 : La lutte de classes révolutionnaire, l’insurrection, la guerre civile prolongée sont trois chaînons dans un même combat pour la libération.

Page 123 : La priorité pour les années à venir est de faire assimiler et appliquer les principes d’organisation et de management définis dans ce livre.

Page 160 : Dans toute organisation, il s’introduit une tendance à voir les cadres devenir inamovibles. (…) Pourtant, l’inamovibilité encourage la routine, le bureaucratisme, la coupure avec les masses, l’absence de créativité, la disparition de l’esprit révolutionnaire. (…) Staline a combattu l’inamovibilité par la critique, le contrôle de la base et l’organisation d’élections, puis par l’épuration. Mao Zedong l’a combattu durant la Révolution culturelle.

Page 267 : Militer chaque fois que l’on se rend à une réunion, à une activité : il arrive trop souvent que des cadres se rendent à des activités sans vendre de matériel et sans faire un travail de recrutement.

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