Chrétiens d’Orient : la frilosité belge
Le martyre des chrétiens d’Orient laisse de glace une bonne partie du monde politique belge. L’Eglise fait profil bas. Pourquoi ce manque de solidarité ?
Une véritable terreur s’est abattue sur le nord de l’Irak. L’une après l’autre, les villes tombent aux mains des djihadistes de l’Etat islamique (EI), bien décidés à imposer leur foi et leurs lois. Environ 200 000 chrétiens et membres d’autres minorités, comme les yézidis, sont chassés, certains réduits en esclavage, voire massacrés. Ces abominations ne sont pas neuves. Pourtant, personne n’a évoqué jusqu’à présent la fameuse « responsabilité de protéger », qui avait justifié, en 2011, l’intervention occidentale en Libye, quand Benghazi et ses insurgés étaient menacés par les troupes de Kadhafi.
L’embarras diplomatique est patent. Etats-Unis, France et Royaume-Uni reçoivent en pleine face le retour de leurs politiques erratiques dans ce monde arabe compliqué. L’invasion américaine en Irak en 2003 (sans l’aval de la Belgique) n’a pas fini de produire ses effets délétères. Non seulement ces pays ont joué aux apprentis sorciers de la démocratie, avec des opérations militaires sans vision stratégique, mais ils ont noué des relations perverses avec des monarchies du Golfe, qui apportent du combustible aux conflits syriens et irakiens.
La Belgique aurait pu se démarquer de cette incohérence. Mais non. Alors que le gouvernement belge avait décidé, en 2011, d’envoyer des F-16 en Libye afin de protéger les civils menacés par Kadhafi, il n’a pris, en 2014, aucune mesure concrète pour aider les minorités d’Irak.
Aujourd’hui, c’est un silence assourdissant qui prévaut dans les travées de nos parlements, comme dans les milieux associatifs ou académiques. Pourquoi cette frilosité qui confine à l’abandon pur et simple de populations en détresse ? « Les chrétiens orientaux considèrent les pays européens comme leurs alliés naturels, rappelle au Vif/L’Express le député flamand Ward Kennes (CD&V). En 2011, il avait fait adopter à l’unanimité une résolution en leur faveur au Parlement flamand. « Si nous ne prenons pas notre responsabilité, personne ne le fera à notre place, poursuit-il. Or je constate même un sentiment de gêne chez beaucoup de Belges et d’Européens par rapport à la défense des droits fondamentaux des minorités chrétiennes ».
Malgré les récentes déclarations très fermes du pape François, même l’Eglise belge semble tétanisée à l’idée de prendre une position trop en pointe. Rien de tel en France, où l’épiscopat et les autorités politiques se sont mobilisés. Pourquoi cette frilosité ?
Marie-Cécile Royen et François Janne d’Othée
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