Appel au boycott du Salon de l’auto
Une coalition d’associations et de mouvements citoyens actifs dans la mobilité durable ont organisé une manifestation jeudi matin à Bruxelles, à l’entrée du siège de la Febiac, la fédération de l’automobile, où était présentée la prochaine édition du Salon de l’auto. Ces organisations appellent le grand public à boycotter l’événement, qualifié de « show publicitaire », et souhaitent que la promotion des voitures, notamment la publicité soit régulée par les autorités publiques.
La coalition regroupe le GRACQ-les cyclistes-quotidiens, Bruxsel’Air, Inter-Environnement Wallonie, le BRAL, 1030/0, le Fietsersbond et Extinction Rebellion Bruxelles. Une dizaine de leurs représentants avaient fait le déplacement jusqu’à la Febiac, où la police était également présente pour encadrer leur action.
A leurs yeux, l’urgence climatique -en pleine COP 25-, la pollution de l’air, en particulier dans les villes, et la sécurité des piétons et cyclistes imposent de ne plus tergiverser. « Le climat se dérègle et la pollution de l’air est responsable de plus de 9.000 décès prématurés par an en Belgique », déplore Aurélie Willems, secrétaire générale du Gracq, pour qui la contribution de l’automobile à cette situation est « conséquente » et a un « impact très négatif ». A l’image du tabac, la voiture tue! » insiste-t-elle.
Or, à l’approche du salon, les publicités, majoritairement pour des voitures « puissantes, rapides et massives, donc plus dangereuses », vont occuper plus fréquemment, « et durant un trimestre », les créneaux et espaces publicitaires des médias ainsi que les panneaux réservés à cet effet dans l’espace public, dénoncent les organisations, qui s’inquiètent de cette évolution du marché. « On nous vend du rêve mais la réalité est toute autre », répètent-elles depuis dix ans, selon leur affirmation.
Elles ont particulièrement dans leur viseur les SUV, les véhicules les plus tendance du moment, « qui assurent les marges bénéficiaires les plus confortables » aux constructeurs automobiles. « Ils promeuvent virilité, puissance, liberté et protection face aux ‘dangers extérieurs’. (…) Leur succès a même ébranlé l’Agence internationale de l’énergie qui voit là ‘un changement structurel silencieux qui prend la forme d’un transfert dramatique vers des véhicules plus grands et plus lourds' », situe la coalition.
« Les discours politiques prônent d’une part une ville plus agréable et plus conviviale avec un objectif de réduction de la pollution. Mais, dans le même temps, la publicité automobile est omniprésente dans notre environnement », constate Aurélie Willems. Elle assure ne pas être opposée aux voitures mais estime qu’il n’y a pas besoin d’en faire une telle promotion.
Les organisations demandent ainsi aux autorités compétentes de réguler l’incitation à l’achat de ces véhicules « dont la quantité doit se réduire drastiquement dans un délai court, surtout dans leurs variantes les plus nuisibles ». Idéalement, elles voudraient supprimer toute publicité pour les voitures. Mais, si une progressivité en la matière s’avère nécessaire, elles préconisent au minimum de l’interdire pour les véhicules à moteur à combustion interne émettant plus de 95 grammes de CO2/km et ceux dont le poids, la puissance et la vitesse sont excessifs et dont la forme de la face avant est dangereuse pour les autres, ce qui inclut la grande majorité des SUV, détaillent-elles.
La coalition plaide, à la place, pour la promotion et le développement rapide d’une mobilité alternative dans laquelle la voiture occuperait une place « modeste » à côté des transports en commun et des modes de déplacement actifs.
D’après le Gracq, les autorités politiques bruxelloises sont « très à l’écoute » de ces préoccupations, dont certaines se sont retrouvées dans l’accord de gouvernement régional. Mais il y a parfois un grand hiatus entre l’écoute, les discours et les actes, relève-t-il.
« Tous les voyants sont au rouge, aucune tergiversation n’est aujourd’hui autorisée en matière de pollution de l’air et de climat. Bruxelles vient de vivre une année très noire en matière de sécurité routière », alertent les organisations. Elles invitent donc les citoyens à ne pas se rendre au salon de l’automobile au mois de janvier.
D’autres actions de sensibilisation auront lieu durant l’événement, notamment via les réseaux sociaux.
« Nous nous inscrivons de plus en plus dans un univers où la multimodalité est importante », réagit la Febiac. « Il faut arrêter d’opposer les différentes formes de mobilité, qui sont complémentaires. Nous devons travailler ensemble et sommes ouverts au dialogue. »
Pour la fédération, il n’y a pas UN modèle de voiture qui assure la sécurité des piétons et des cyclistes. Elle réfute l’attaque contre les SUV, soulignant qu’il n’y a aucun crash test qui a démontré une dangerosité plus accrue de ce modèle. Selon elle, il serait « un peu naïf de croire que s’en prendre à eux constitue une réponse adéquate au problème de la sécurité routière ».