Agriculture, tourisme, culture…: les conséquences dommageables d’un été pourri
L’année 2021 est d’une météo particulièrement maussade. De nombreux secteurs vivent des moments difficiles, après un été 2020 déjà impacté par la pandémie et la sécheresse. Tour de table de l’impact du mauvais temps.
Le mauvais temps, on ne parle que de ça cet été. Certains se plaignent de ne pas pouvoir bronzer et se baigner, même si d’autres aiment lire un livre, boire un thé, réfléchir à la vie et regarder les gouttes de pluie qui perlent sur la fenêtre. Mais plus fondamentalement, les conséquences sont lourdes: les secteurs de l’agriculture, du tourisme et de la culture vivent des moments préoccupants.
Récoltes: trop tôt pour évaluer
« Avec les pluies abondantes, des plants de céréales ont été couchés, et il y a eu de la vermination », explique Sabine Decoster, secrétaire générale de Fugea, syndicat agricole. « Mais on sait pas encore évaluer s’il y a eu des pertes. Il faut faire des analyses du rendement ». Il est en effet encore tôt pour évaluer la situation: différents types de blé sont récoltés à différents moments, l’escourgeon par exemple début juillet. Le froment devrait bientôt être récolté. Il accuse une à deux semaines de retard, mais pour Sabine Decoster, « on est dans les temps ».
Il y a aussi des différences entre les types d’agriculture: le bio, notamment pour les betteraves et les pommes de terre, est impacté par la maladie du mildiou. Mais là aussi, il faut attendre les récoltes pour voir le réel impact sur le rendement. Ces deux plantes sont récoltées en septembre, donc les semaines à venir sont importantes.
« Les pluies abondantes ont abîmé les fruits », ajoute Sabine Decoster, mais la situation doit aussi être observée dans les semaines qui viennent. « Les fraises ont par exemple été récoltées en mai/juin, et la récolte a été très bonne ».
La situation diffère également selon les régions, certaines ont été plus touchées que d’autres. Pour des pluies abondantes, le Fonds des calamités agricoles peut intervenir, comme pour les sécheresses. Il est décidé par les communes, avec les données météo de l’Institur royal de météorologie (IRM) et les calculs moyens du rendement.
Une période sensible pour le raisin
« Il y a une pression forte pour le mildiou cette année. Depuis début juin, on a eu 300 mm de précipitations sur le domaine, contre 700 sur une année, en général. Donc il y a beaucoup d’humidité, ce qui est une condition favorable pour le mildiou », explique Pierre-Marie Despatures, vigneron au domaine du Chenoy, situé à Emines en province de Namur. Les cépages cultivés sont assez résistants à cette maladie, mais les vignes se trouvent actuellement à un stade sensible, et ce jusqu’à la véraison, le moment où elles changent de couleur.
En juin et en juillet, en effet, les raisins se développent et sont plus exposés à la maladie. « En France ils travaillent avec des cépages plus sensibles, donc avec l’humidité de cette année, il y a plus de problèmes », compare Pierre-Marie Despatures. Le vigneron ne sait pas encore évaluer l’effet du mauvais temps sur la récolte, mais estime bientôt ne plus être sous la pression du mildiou ; « c’est la dernière semaine problématique, après il devrait faire moins mauvais ensuite ».
Reste tout de même un hic: le soleil. Ou son absence, plutôt. « Il y a deux périodes où le vin a besoin de soleil. En juin, et là heureusement il a fait plus ou moins bon, et à la fin août – début septembre ». Pierre-Marie Despatures espère alors assez d’ensoleillement pour la fin du mois, qui est nécessaire pour la maturation du raisin : pour faire descendre l’acidité et faire monter le sucre. « Si le temps continue à être comme ça, ça peut devenir problématique, mais pour l’instant nous n’avons pas encore de grosse panique ».
50% de visiteurs en moins
Dans le secteur touristique, on déguste.
A l’Aventure Parc de Wavre, Brice Visart constate une nette baisse des fréquentations: environ 50% de visiteurs en moins qu’une saison normale. Il y a moins de réservations, mais des personnes annulent également à cause du mauvais temps, à part les grands groupes et stages déjà organisés.
« Lorsque je regarde mon gsm, je vois par moments qu’il y a des chances de pluie, mais à l’extérieur il fait sec et il y a un rayon de soleil. On ne sait jamais, il y a toujours la chance de passer entre deux gouttes », explique Brice Visart. Il comprend que des personnes veuillent annuler, mais essaie toujours de les convaincre de venir. « On est en dessous des arbres, donc on est protégé de le pluie. En plus il y a un avantage pour les visiteurs, car s’il y a moins de monde, ils doivent faire moins de file ».
L’humidité n’étant pas un phénomène inhabituel en Belgique, le parc est également équipé avec du bois traité pour éviter qu’il devienne glissant en cas de pluie. Mais après une année de covid et de fermetures, puis un mois de juillet historiquement maussade, le parc accuse le coup. « Même le mois d’août semble un peu compromis, mais bon on espère quand même un peu de beau temps. Le 15 août est un week-end important pour nous », pense Brice Visart.
Une cinquantaine de campings touchés par les inondations
« Nous avons eu des retours des campings selon lesquels, suite aux intempéries, ils ne sont pas complets. Notamment depuis les inondations, il y a eu beaucoup d’annulations », explique Clémentin Lavis de la Fédération des campings de Wallonie.
Une cinquantaine de campings, sur les environ 100 membres, ont été touchés par les inondations. « Le long de la Semois, la situation a été rétablie, mais sur l’Ourthe et la Lesse, certains campings sont toujours fermés », ajoute Clémentin Lavis. Les activités sportives qu’offrent certains campings, comme la location de Kayaks, sont également à l’arrêt.
De même que de nombreux Belges, Clémentin Lavis ainsi que les exploitants de campings espèrent le retour du soleil pour le mois d’août.
L’été mitigé de la culture
L’été est synonyme de concerts et spectacles en plein air, festivals, cinéma hors les murs…. mais de nombreux spectateurs ont reçu des e-mails de dernière minute, les notifiant de l’annulation ou du report de l’événement, pour cause de mauvais temps.
Le week-end passé, le cinéma bruxellois Galeries prévoyait par exemple des séances à la piscine plein air temporaire, Flow, à Anderlecht, dans le cadre de son festival l’heure d’été, ayant lieu à divers endroits en plein air, dans la capitale, de fin juin à début août. « Avec les prévisions météo, on n’aurait que pu maintenir certaines projections, donc on a préféré reporter au 10-14 août, où il devrait faire plus beau. Et le soleil se couchera plus tôt, on pourra montrer les films un peu plus tôt », explique le directeur Frédéric Cornet.
Toutes les autres séances ont cependant pu avoir lieu, à part une seule, à Vauxhall, dans le parc royal. « On a vraiment été chanceux, souvent il a plu juste avant, ou juste après les projections, mais on a vraiment pu passer entre deux gouttes », se réjouit le directeur.
Si les séances ont, pour la plupart, pu avoir lieu, le public était tout de même moins présent. Contre 500 personnes en temps normal, seules 100 sont venues assister aux séances de juillet. « En soi, nous n’y perdons rien, comme toutes les séances étaient gratuites. Mais on a sous-titré tous les films en deux langues, donc c’est un peu dommage pour cet effort fourni », ajoute Frédéric Cornet.
Le cinéma Galeries tire un bilan somme toute positif de son festival. Au festival Esperanzah à Floreffe, ayant eu lieu le week-end passé, les gens ont dansé sous la pluie. « Vivre d’amour, de musique et d’eau fraîche », commentait la page Instagram du festival, comme légende sous des photos de festivaliers en poncho en plastique, trempés. D’autres acteurs culturels, qui organisaient aussi des événements à l’extérieur dont certains ont dû être annulés pour cause du mauvais temps, n’ont pas répondu à nos demandes d’interviews.
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