Anne-Sophie Bailly

Télétravail | Il est temps de parler d’autre chose que d’horaires et de flex desks

Anne-Sophie Bailly Rédactrice en chef

Les débats sans fin sur les horaires, les flex desks et les animations pseudo-ludiques manquent singulièrement de perspectives.

C’est à un retour de balancier qu’on assiste aujourd’hui. Si décembre 2019 et la pandémie de coronavirus avaient généralisé le télétravail, décembre 2024 signera lui la fin du distanciel pour les employés d’Amazon. Le géant du commerce en ligne emboîte ainsi le pas à d’autres sociétés de la tech qui décrètent le retour du personnel en présentiel, obligatoire et à temps plein. En Europe, les employeurs tentent aussi de ramener davantage les employés in situ. La latitude laissée jusqu’il y a peu dans les organisations se traduit désormais en consignes claires. Trois jours minimum sur place devient la nouvelle norme.

Le retour accru au bureau s’avère donc une tendance indéniable. Mais pour autant, l’équilibre est difficile à trouver au sein des organisations. D’un côté, les employeurs avancent que cinq années de travail à distance ont plombé la productivité de leurs équipes et miné la culture d’entreprise. De l’autre, les travailleurs se sont installés dans une nouvelle routine qui, allégée du temps des trajets, leur offre une meilleure balance entre vies privée et professionnelle. Et si les entreprises sont conscientes que la possibilité de télétravailler constitue un levier au moins aussi pertinent que la rémunération pour recruter et fidéliser des talents, les employés, eux, restent lucides sur l’impact que leur (in)visibilité peut avoir sur l’avancement de leur carrière ou la décision d’un licenciement.

Le grand débat du moment se cristallise donc autour de ces deux questions. Un: combien de jours de télétravail autoriser? Deux: comment réunir les collaborateurs d’une équipe, les mêmes jours, sur un même lieu?

Le retour accru au bureau est une tendance indéniable. Mais l’équilibre est difficile à trouver.

C’est pourtant se tromper de débat. C’est la manière même d’envisager le travail hybride qui doit être repensée pour dépasser l’opposition qui persiste entre la présence, synonyme d’engagement et de conscience professionnelle, et la distance, synonyme, elle, d’absence et mère de toutes les suspicions. C’est une réflexion sur la manière de faire cohabiter harmonieusement au sein d’une même structure les collaborateurs qui peuvent travailler à distance et ceux qui ne le peuvent pas, ceux qui font faire et ceux qui font, qui doit être menée. C’est la finalité de la présence des travailleurs et le bénéfice que l’individu comme le groupe peuvent en retirer qui doivent devenir centraux dans la mise en place des nouveaux modes de fonctionnement. Car la présence simultanée de plusieurs personnes dans un même espace ne suffit pas pour créer une dimension collective au travail, ni à lui donner du sens. C’est une condition certainement nécessaire, mais non suffisante pour initier la collaboration d’une équipe, la productivité commune ou la dynamique d’un groupe.

Alors si la décision radicale d’Amazon et consorts semble marquée du sceau du passé, les débats sans fin sur les horaires, les flex desks et les animations pseudo-ludiques manquent quant à eux singulièrement de perspectives.

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