L’omnipotence du Premier ministre Narendra Modi pourrait-elle être ébranlée à l’issue des élections législatives? © BELGA IMAGE

Elections en Inde: cinq ans de plus pour Modi?

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le Premier ministre sortant est donné favori des élections législatives face à Rahul Gandhi et le parti du Congrès.

Un bilan, une popularité, des moyens, c’est sur ces éléments que le Premier ministre indien, Narendra Modi, s’appuie pour revendiquer un troisième mandat à la tête du gouvernement à l’occasion des élections législatives en Inde, qui se tiennent à partir du 19 avril. Lors de la campagne de 2014, la première du Parti indien du peuple (BJP) sous sa direction, l’ancien chef du gouvernement de l’Etat du Gujarat forgea sa victoire sur la promesse d’étendre à l’ensemble du pays les méthodes qui lui avaient permis de réussir le boom économique et le développement de sa région. En 2019, il mit l’accent sur la sécurité et la protection des frontières et emporta à nouveau la mise parce que les tensions avec la Chine et le Pakistan étaient devenues un sujet de préoccupation majeure pour ses concitoyens. Cette année, c’est la question identitaire qu’il a investie pour séduire les électeurs, dans une forme d’aboutissement de la politique hindouiste et antimusulmane qu’il a menée lors de son deuxième mandat. Celui-ci fut marqué par la révocation du statut de semi-autonomie dont bénéficiait la région à majorité musulmane du Cachemire, par un recensement dans l’Etat de l’Assam qui aboutit à la déchéance de la citoyenneté de centaines de milliers de musulmans et par la modification du code de la nationalité qui réserve l’accès à la naturalisation aux immigrés non musulmans d’Afghanistan, du Bangladesh et du Pakistan arrivés dans le pays avant 2015.

«Modi pourrait devoir simplement sa victoire à la faiblesse, originelle ou contrainte, de l’opposition.»

L’impact de cette politique dans la campagne électorale actuelle a connu son point d’orgue avec l’inauguration, en janvier, du temple dédié à la divinité Ram à Ayodhya. Il a été construit sur l’emplacement d’une mosquée bâtie par le premier empereur moghol Babur, qui régna entre 1526 et 1530. Celle-ci avait été démolie en 1992 par des fanatiques hindous. En menant à bien le projet, Narendra Modi assouvit le fantasme de domination des nationalistes hindous. Le tropisme nationaliste conduira-t-il le chef du BJP vers la victoire?

Fébrilité du pouvoir?

C’est probable. Mais le Premier ministre sortant pourrait la devoir simplement à la faiblesse, originelle ou contrainte, de l’opposition. Le Congrès, principal parti d’opposition, a constitué une alliance avec de plus petites formations d’opposition, mais elle est fragile. Son leader, Rahul Gandhi, est certes le petit-fils de la Première ministre Indira Gandhi, et l’arrière-petit-fils de Jawaharlal Nehru, premier Premier ministre de l’Inde indépendante. Mais il n’a pas la popularité de Modi. Enfin, le pouvoir s’est attelé à mettre des entraves au financement de la campagne du Congrès, et monopolise les moyens médiatiques aux dépens de son rival. La course est-elle pour autant perdue pour l’héritier des Gandhi? Interrogé par le magazine Le Grand Continent, le spécialiste de l’Inde Christophe Jaffrelot voit dans le gel des comptes bancaires du Congrès et l’arrestation du chef du Parti de l’homme ordinaire les signes d’une fébrilité certaine du pouvoir, et dans l’alliance constituée par Rahul Gandhi un signe de possible sursaut. Jusqu’à la victoire? Cela tiendrait du miracle.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire