Le vote est obligatoire pour les élections locales en Wallonie et à Bruxelles, mais plus en Flandre © Getty Images

Elections communales 2024: pourquoi le vote est obligatoire (sauf en Flandre)

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Le 13 octobre 2024, les Belges se rendront aux urnes pour les élections communales et provinciales. Plus qu’un droit, le vote est même un devoir en Belgique. Pourquoi est-il obligatoire ?

Pour les élections communales et provinciales du 13 octobre 2024, le vote est obligatoire en Wallonie et à Bruxelles. Mais nouveauté en Flandre: ce ne sera plus le cas. La Flandre a supprimé cette obligation pour les élections locales. Si Wallons et les Bruxellois recevront, comme d’habitude, une lettre de convocation, c’est bien un lettre d’invitation (à voter ou non), que recevront les électeurs flamands. C’est l’Open Vld qui tenait à cette disposition, avec le soutien de la N-VA. Pour les libéraux, il faut laisser le libre le choix aux électeurs. De plus, même si les élections sont en théorie obligatoires, les sanctions en cas d’abstention ne suivent pas.

Egalité

Le vote est obligatoire en Belgique depuis 1893. Cette nouveauté, à l’époque, coïncide avec une autre réforme qui marque l’histoire de la Belgique : l’instauration du suffrage universel masculin tempéré par le vote plural. Chaque homme dispose d’une voix mais certains, selon les qualités dont ils disposent, en bénéficient d’une ou deux supplémentaires. «Tout le monde n’est pas égal mais on introduit un peu plus d’égalité dans la participation au scrutin», observe Benjamin Biard, chercheur au Centre de recherche et d’information socio-politique (CRISP).

Si en 1893, le droit de vote est élargi, c’est en raison des mobilisations importantes qu’a connu le pays peu de temps avant. Autant les libéraux que les socialistes veulent voir la participation au scrutin élargie et font alors pression. «Les libéraux font de l’élargissement électoral une priorité depuis leur fondation en parti politique en 1846. Les socialistes, à travers le POB (NDLR: le parti ouvrier belge), vont appeler à la mobilisation sociale. Des manifestations, parfois violentes, vont voir le jour parce qu’ils considèrent que le programme socialiste ne peut être mis en place qu’à travers une participation gouvernementale et qu’une pareille participation ne peut être réalisée qu’à travers un mode de scrutin élargi à davantage d’électeurs», développe Benjamin Biard.

Les catholiques, alors au pouvoir, vont introduire le suffrage universel tempéré par le vote plural afin d’apaiser les tensions. De cette façon, ils répondent aux demandes d’élargissement du droit de suffrage tout en maintenant une certaine marge de manoeuvre par rapport aux voix qui pourraient être éparpillées parce que ceux qui bénéficient de voix supplémentaires font partie de l’électorat du parti catholique.

Un tel élargissement du droit de vote s’est accompagné d’une crainte: celle que l’abstention profite à l’adversaire. Ainsi, en instaurant le suffrage universel (tempéré par le vote plural), la Belgique adopte en même temps l’obligation de vote. «Cela a nécessité de multiplier et d’organiser des bureaux de vote beaucoup plus près que ceux qui existaient quand on avait un scrutin majoritaire, où il y avait d’ailleurs un nombre d’électeurs beaucoup plus réduit», ajoute Pierre Vercauteren, politologue et professeur de sciences politiques à l’UCLouvain.

Vote obligatoire, toujours pertinent ?

Selon Benjamin Biard, plusieurs positionnements se repèrent dans la société: «D’un côté, certains considèrent que le vote obligatoire permet de restaurer une part d’égalité entre les citoyens. En effet, il est attesté que les électeurs dotés d’un plus faible capital économique et éducatif soient les moins enclins à se rendre aux urnes. Cela fait dire à certains qu’une faible participation électorale traduit finalement une forme de «cens caché», explique le chercheur.

De l’autre côté se trouvent ceux qui estiment que le droit de vote devrait rester un droit, et non être une obligation. «Pour les détracteurs du vote obligatoire, l’obligation de vote est une atteinte aux libertés individuelles: chacun doit être libre de voter ou non», ajoute-t-il.

Pour Benjamin Biard, tous ces débats reflètent aussi de calculs politiques où chaque parti essaie de maximiser ses chances: promouvoir la fin de l’obligation de vote ferait-il perdre ou gagner des voix ?

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