Tireur du Thalys : la piste de l’islamisme radical se dessine
Le tireur du train Thalys Amsterdam-Paris, maîtrisé par des passagers dont des militaires américains, s’était rendu en Syrie et était connu des services de renseignement français et espagnols pour ses liens avec la mouvance islamiste radicale. Il serait également connu des services belges.
Vendredi, l’homme est monté dans le Thalys 9364 à Bruxelles. Armé d’un fusil d’assaut kalachnikov avec neuf chargeurs, d’un pistolet automatique Luger et d’un cutter, il a ouvert le feu à 15H50 GMT, peu après le passage de la frontière française.
Le tireur du train Thalys Amsterdam-Paris, maîtrisé par des passagers britannique et américains, s’était rendu en Syrie et était connu des services de renseignement français et espagnols pour ses liens avec la mouvance islamiste radicale, selon les premiers éléments de l’enquête samedi.
Si son identité se confirme, ce Marocain, qui fêtera ses 26 ans le 3 septembre, a vécu en 2013 et jusqu’en mars 2014 à Algesiras, en Andalousie (sud de l’Espagne), où il était connu pour trafic de drogue, selon une source des services antiterroristes espagnols.
Transféré samedi matin d’Arras (nord de la France) aux locaux de l’antiterrorisme en région parisienne, le suspect, qui nie toute motivation terroriste, avait été signalé en février 2014 par les services espagnols à leurs confrères français « du fait de son appartenance à la mouvance islamiste radicale », a précisé le ministre français de l’Intérieur Bernard Cazeneuve.
Plus d’un an plus tard, le 10 mai 2015, il était localisé à Berlin, où il embarquait pour la Turquie, selon une source proche des renseignements français, qui disent alors avoir appris des Espagnols que cet homme était désormais installé en Belgique. Mais selon les services antiterroristes espagnols, le suspect serait en fait parti de France pour se rendre en Syrie et serait ensuite revenu en France.
Koen Geens a par ailleurs précisé que « si le nom qui circulait hier et ce matin est confirmé, je peux répéter qu’il est en effet connu de nos services », indique-t-il. Son nom a été transmis par des services de sécurité étrangers, qui le signalaient comme « potentiellement djihadiste », sans qu’il ne soit connu comme quelqu’un de dangereux. « Vous comprenez, nous recevons énormément de noms de ce genre », indique Geens.
Les évènements
Un premier voyageur français, âgé de 28 ans et employé dans une banque aux Pays-Bas, a tenté de le désarmer alors qu’il sortait des toilettes. Le suspect a réussi à lui échapper et « plusieurs coups de feu » ont été tirés, une balle atteignant un passager franco-américain, qui était assis « sur son siège », selon Bernard Cazeneuve.
Un groupe composé d’Américains en vacances, dont deux militaires, et d’un sexagénaire britannique, est alors intervenu, réussissant à le maîtriser. Le courage de ces hommes, dont l’un a été blessé, a été salué par le président Barack Obama, le Premier ministre britannique David Cameron, et François Hollande qui les recevra tous à la présidence française « dans les prochains jours ». « On a entendu un coup de feu et du verre brisé. J’ai vu un type avec une AK (kalachnikov), » a raconté à des télévisions Alek Skarlatos, 22 ans, membre de la garde nationale de l’Etat de l’Oregon, rentré il y a peu d’une mission en Afghanistan. « Mon ami (Spencer Stone, autre militaire américain) et moi on s’est baissé et puis on s’est dit +on y va+ (…) On l’a frappé à la tête jusqu’à ce qu’il perde connaissance ». Dans la bagarre, M. Stone a été blessé au cutter au cou et à la main par l’agresseur, qui n’a pas fait usage de sa kalachnikov. Il a été opéré à la main mais devrait quitter la clinique samedi soir.
Une arme enrayée
« Pour être honnête, je ne sais pas pourquoi il n’a pas réussi à tirer mais je pense que c’est parce que son arme s’est enrayée », a déclaré à la presse Chris Norman, un consultant britannique de 62 ans qui a aidé à maîtriser l’agresseur. « On a tous eu énormément de chance », a-t-il jugé.
Sur des images filmées au téléphone portable à l’intérieur du train, on voit l’assaillant, un jeune homme mince, torse nu, plaqué au sol sur le ventre, les mains attachées dans le dos. Une kalachnikov est posée contre un siège et du sang est visible sur une vitre du wagon.
Légèrement blessé en actionnant le signal d’alarme, l’acteur français Jean-Hugues Anglade, qui se trouvait dans le train, a accusé les agents du Thalys de s’être enfermés dans la voiture motrice puis d’avoir refusé d’ouvrir aux passagers malgré leurs appels à l’aide.
Thalys a en réponse apporté son soutien à l’agent mis en cause, assurant qu’il avait mis à l’abri plusieurs passagers, et souligné « la très forte mobilisation de son personnel ». Le président des chemins de fer français, Guillaume Pepy, a indiqué qu’il recevrait dans les prochains jours le comédien.
Le parquet antiterroriste de Paris, dont la compétence est nationale, s’est saisi de l’enquête. Le parquet fédéral belge a également ouvert une enquête pour terrorisme. La Belgique a par ailleurs renforcé les mesures de sécurité dans ses trains et ses gares.
Cette nouvelle attaque survient huit mois après les sanglants attentats de janvier contre le journal satirique Charlie Hebdo et un supermarché cacher de Paris. Depuis, plusieurs tentatives d’attentats jihadistes ont été déjouées en France, selon les autorités.