Quelle vie après l’extrémisme religieux ?
Se sortir de l’emprise d’une secte religieuse est un vrai bouleversement. Ceux qui l’ont fait racontent qu’en perdant leur foi, ils ont presque tout perdu. La liberté se paye cash. The Guardian revient sur leur émouvante « évasion ».
Megan Phelps-Roper a trente ans et faisait partie d’une église baptiste fondée par son propre grand-père. La secte est connue pour ses manifestations aux enterrements pour signifier aux proches que celui qui est mort n’a que ce qu’il mérite. En grandissant, elle commence à se poser des questions. Longtemps, la pensée d’un jour quitter la secte sera son pire cauchemar. Très investie dans la secte, elle va même faire la promotion de son église sur internet à partir de 2009. Elle est très zélée, mais au travers des réseaux sociaux elle commence à percevoir les autres comme des autres humains et plus comme des gens à condamner. En 2012, elle décide, avec sa soeur, de quitter la secte. La sanction est immédiate : elle est rejetée, exclue. Encore aujourd’hui, elle a, parfois, des réminiscences de ses anciennes croyances dit-elle dans The Guardian. Elle sait qu’elle n’est qu’au début d’un long travail de déprogrammation et a encore beaucoup de mal avec l’idée qu’elle ait pu se réjouir de la mort d’autres personnes.
Deborah Feldman, 29 ans faisait partie de The Satmar sect of Hasidic Judaism, créée par des survivants de l’holocauste qui voulait construire une communauté très stricte, car ils pensaient que l’holocauste était une punition pour les péchés des juifs. Ils devaient suivre des règles très précises sous peine que l’holocauste ne se reproduise. « La communauté était si stricte que nous n’étions jamais en contact avec le monde extérieur ». Pas une chose aisée en plein Bronx. Enfant, elle est un peu rebelle et pose la question tabou du pourquoi. Ostracisée dans la communauté, elle comprend rapidement qu’elle doit garder ses idées pour elle et va dès lors construire une façade pour pouvoir survivre. Elle se marie avec quelqu’un de la secte à 17 ans et a un fils. Le plus dur, dit-elle, était de mentir en permanence. Nier, qui elle était au fond d’elle-même, c’était comme se suicider à petit feu. Elle prépare méticuleusement sa fuite. Cela lui prend trois ans, mais quand tout est prêt, elle n’ose plus. Un accident de voiture auquel elle réchappe par miracle va lui donner le courage. Depuis sa famille a coupé tout contact et ne fait plus que lui envoyer des lettres de menace. Tout comme Megan, elle a du mal à s’enlever de la tête tout ce qu’on lui a inculqué. Notamment le fait qu’elle ait grandi en pensant qu’elle était génétiquement inférieure.
Imad Iddine Habib, 26 ans, est ancien salafiste. « Je suis né un vendredi à l’heure de la prière. Un très bon signe » dit-il dans The Guardian. « Dès quatre ans, on m’envoie à l’école coranique salafiste. Dyslexique, j’ai appris le coran par coeur pour éviter de décevoir ma famille. Mais dès 13 ans je savais que je n’y croyais plus. On ne pouvait que suivre aveuglément ce que l’on nous apprenait et je ne trouvais pas cela normal. J’ai fait mon coming-out à 14 ans et j’ai dit à mes parents que je n’étais pas croyant et que j’étais pansexuel ». La réaction n’a pas manqué : entre violence et menace, sa mère tombe malade. Mais il est résolu. Sa famille finit par le jeter dehors. Il ne les a plus jamais revus. Depuis Imad a suivi des études en sciences islamiques et a fondé le Council of Ex-Muslims of Morocco. Il reçoit un nombre incalculable de menace de mort. Il a même dû fuir son pays pour Londres pour éviter d’être jeté en prison. Car au Maroc, il n’est pas bon de dire ouvertement qu’on n’est pas musulman.
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