Migrants: au coeur d’un refuge de nuit clandestin à Budapest

Caroline Lallemand Journaliste

Jean-Michel, 43 ans, est traducteur auprès d’une institution européenne depuis 2004. Depuis une vingtaine d’années, il se rend fréquemment en Hongrie qu’il considère comme « une seconde patrie ». Lors de son dernier séjour à Budapest, il a eu l’occasion de se porter bénévole dans un centre d’aide aux réfugiés. Il nous explique son expérience.

Jean-Michel, 43 ans, est traducteur auprès d’une institution européenne depuis 2004, année de l’adhésion de la Hongrie à l’UE. Belge, Il a appris le hongrois dans le cadre d’études de langues et lettres aux Pays-Bas. Depuis une vingtaine d’années, il se rend fréquemment dans ce pays qu’il affectionne particulièrement et qu’il considère comme « une seconde patrie ». Il y compte de nombreux amis proches et y passe quasiment toutes ses vacances. C’est lors de son dernier séjour qu’il a eu l’occasion de se porter bénévole pour aider les réfugiés arrivés en nombre dans la capitale hongroise. Il nous livre son témoignage.

Dans quel contexte êtes-vous allé aider ces réfugiés?

Depuis le début de cette crise, je suis les événements essentiellement à travers les publications Facebook de mes amis hongrois, qui sont de tous bords politiques. Il faut savoir que les clivages politiques en Hongrie sont beaucoup plus marqués et profonds que chez nous. Il n’aura échappé à personne que la vie politique hongroise ne manque pas de radicalité. La crise migratoire a, comme bien d’autres sujets, été largement exploitée politiquement par le gouvernement mais aussi – on le dit moins – par les opposants à Viktor Orbàn, qu’ils soient issus de la société civile ou des partis d’opposition sinistrés depuis la victoire écrasante du Fidesz. J’ai lu beaucoup de désinformation et de propos très tranchés, pas toujours intellectuellement très honnêtes. Un peu comme si la crise migratoire n’était qu’un enjeu parmi d’autres dans une lutte à couteaux tirés.

Je crois que ce qui m’a décidé à agir concrètement sont les accusations de passivité qui ont été proférées par certains milieux associatifs de gauche à l’encontre d’organisations catholiques subventionnées telles que Caritas ou la branche caritative de l’Ordre de Malte en Hongrie (Magyar Máltai Szeretetszolgálat) pour laquelle travaillent pourtant d’arrache-pied plusieurs amis proches. J’ai donc pris contact avec ces derniers à la veille de mes vacances afin de proposer mon aide, a priori en tant que traducteur/interprète pour le russe, l’anglais et le français auprès des médecins de l’Ordre de Malte. De toute façon, je me voyais mal passer une semaine à Budapest en faisant comme si ces milliers de gens en détresse n’étaient pas là.

Des réfugiés à la gare de Keleti de Budapest.
Des réfugiés à la gare de Keleti de Budapest. © REUTERS

De l’Ordre de Malte à un refuge clandestin géré par des anarchistes…

Il s’est bien vite avéré que, pour des raisons pratiques, aider les médecins de l’Ordre de Malte n’était pas possible à ce moment précis. Une amie travaillant pour la Fondation « Menhely » (« Refuge ») s’est donc rapidement renseignée et m’a mis en contact avec leur dispatching. Il a d’abord été question que j’accompagne des migrants entre la gare de l’Est (Keleti) et différents lieux où ils passent la nuit, mais j’ai finalement été orienté vers un refuge de nuit clandestin. J’ai reçu un numéro de GSM et on m’a dit qu’on attendait mon coup de fil. Au téléphone, le courant est passé tout de suite avec Ági, la responsable. Nous avons convenu que je m’y rendrais le soir même pour un premier contact avec l’équipe et la structure d’accueil. Ági m’a toutefois précisé d’emblée que l’adresse du refuge devait rester secrète pour la raison évidente que la police hongroise pouvait faire une descente et arrêter les réfugiés présents et les bénévoles.

Ceux que l’on appelle ici les « invités » trouvent dans ce sous-sol accueil et écoute, un moment de paix et de repos, un repas chaud à leur arrivée et un petit-déjeuner le lendemain matin.

Quel est le fonctionnement de ce refuge?

Il est situé dans un quartier plutôt mal famé à proximité de la place Blaha Lujza, pour ceux qui connaissent Budapest, à une petite vingtaine de minutes à pied de la gare Keleti. Il m’a fallu passer à deux reprises devant l’entrée avant de la trouver; très difficile en effet de deviner de la rue que cet immeuble en apparence abandonné abrite une structure d’accueil. Le refuge est situé en sous-sol, ce qui lui confère un petit côté abri anti aérien ou caverne d’Ali Baba. En temps normal, il s’agit d’un club d’anarchistes qui accueille parfois des sans-abris ou des jeunes en difficulté. Dans le contexte actuel, les migrants, qu’il s’agisse de familles ou de personnes isolées, sont prioritaires et plusieurs bénévoles sont venus renforcer le noyau initial. La capacité d’accueil maximale est de trente personnes.

Aménagé avec des meubles de récupération, le refuge comporte un espace de couchage, un salon, un coin cuisine avec une grande table à manger et un petit espace de jeu pour les enfants. Le long des murs, des armoires débordent de conserves et d’aliments lyophilisés, de vêtements pour hommes, femmes et enfants, de chaussures, de jouets, de produits de toilette, de médicaments et de nécessaires de premiers soins, autant de dons de personnes bienveillantes et solidaires. Ceux que l’on appelle ici les « invités » trouvent dans ce sous-sol accueil et écoute, un moment de paix et de repos, un repas chaud à leur arrivée en soirée et un petit-déjeuner le lendemain matin, avant de repartir. Ils ont aussi l’occasion de se changer et de se laver, dans un petit coin « salle-de-bain » qui se réduit à quelques bassines et à un robinet d’eau froide. Pour l’eau chaude, c’est la marmite sur le feu, à l’ancienne. Autre problème: pas de chauffage, alors que les nuits sont de plus en plus froides. Heureusement, l’équipe a depuis trouvé un autre local, plus grand, chauffé, où les « invités » pourront se doucher.

Distribution de vêtements aux réfugiés à la gare Keletit de Budapest.
Distribution de vêtements aux réfugiés à la gare Keletit de Budapest. © REUTERS

D’où sont originaires les réfugiés qui y sont accueillis ?

Le premier soir, hormis un jeune Iranien, nous n’avons pas eu de visiteurs mais une arrivée massive de réfugiés était attendue dans la capitale hongroise les jours suivants. Et, de fait, au cours des quatre nuits qui ont suivi, nous avons accueilli surtout des Syriens, mais aussi des Kurdes (de Syrie), des Afghans et des Érythréens, accompagnés jusqu’au refuge par d’autres volontaires chargés de trouver et de convaincre les migrants – pas toujours sans mal! – de s’éloigner de la gare pour passer la nuit au sec.

« Une famille est en route ! » Le refuge est prévenu de leur arrivée une demi-heure à l’avance par téléphone.

Le refuge est prévenu de leur arrivée une demi-heure à l’avance par téléphone et c’est le branle-bas de combat. « Une famille est en route ! », mais il s’agit le plus souvent d’un groupe composé de parents plus éloignés, de voisins ou de gens rencontrés en chemin que d’une véritable famille. Certains ne parlent qu’arabe, dari ou farsi. D’autres parlent anglais plus ou moins bien. Certains vraiment très bien. De jeunes Syriens m’ont expliqué avoir appris l’anglais en regardant des séries. Quand j’ai dit que j’étais belge, une mère de famille syrienne m’a salué dans un français remarquable. Parmi les plus éduqués, certains ont étudié en Russie ou en Ukraine et parlent parfaitement russe. Mais c’est tout de même plus facile en arabe: Tami, une bénévole hongroise ayant vécu au Soudan et en Égypte, était présente tous les soirs, ce qui nous a permis de leur souhaiter la bienvenue en arabe, de leur montrer où ils pouvaient s’installer et de leur expliquer qu’ils pouvaient se servir librement et prendre tout ce dont ils avaient besoin dans les armoires.

Des réfugiés en attente à la gare de Keleti, Budapest.
Des réfugiés en attente à la gare de Keleti, Budapest. © REUTERS

Qu’est-ce qui vous a le plus frappé dans ce refuge ?

Peut-être les différences entre les migrants, qu’on a tendance à voir à travers le prisme de la télé comme une masse indistincte. Si les Afghans sont plutôt réservés, les Syriens, par exemple, m’ont paru très sociables et aussi plus occidentalisés que les autres, d’un grand savoir-vivre, comme s’ils étaient en visite dans votre propre salon! J’ai aussi été frappé par la beauté des femmes syriennes qui, malgré les circonstances difficiles et un voyage sans doute harassant, étaient tout sourire et très soignées. Mais ce sont surtout les Kurdes qui m’ont impressionné. Quand ils sont arrivés, on a tout de suite senti qu’ils étaient différents des Syriens que nous avions déjà accueillis. Le groupe était très soudé et organisé. Tous ont accepté le repas chaud que nous leur avons proposé et ils ont fait manger tous les enfants. Les femmes comme les hommes se sont littéralement jetés sur les cigarettes que nous leur avons offertes. Ils ont ensuite préparé un café turc à réveiller un mort et sont d’ailleurs restés debout une bonne partie de la nuit, à discuter en kurde et à fumer. Ils ont été extrêmement reconnaissants pour l’accueil. Les femmes kurdes étaient différentes des autres Syriennes. Une seule portait un foulard, noué derrière la nuque. Plus masculines et moins effacées, elles discutaient d’égal à égal avec les hommes, cigarette au bec. On comprend mieux que tant de ces femmes mènent une lutte armée sans pitié contre Daesh. D’un autre côté, nous a expliqué Tami, si elles sont capturées, les Kurdes seront traitées par les islamistes comme des animaux.

Son père et un cousin sont toujours cachés dans les bois à la frontière hongroise.

Dans quel état physique et psychologique arrivent ces réfugiés ?

Leur état physique et psychologique m’a paru plutôt bon, surtout au vu des histoires que j’ai pu entendre. Les Syriens nouent facilement la conversation et parlent volontiers de la situation, de leur périple, même des moments les plus pénibles. Certaines familles ont été séparées en chemin. Une femme qui a rejoint le groupe avec son fils d’une douzaine d’année m’a expliqué avoir été séparée de son mari et de ses trois autres enfants dans la cohue précédant l’embarquement dans les bus à Röszke, à la frontière serbe. « C’est dur pour mon fils vu que son frère jumeau est resté là-bas », m’a-t-elle confié. Quand je lui ai demandé si elle comptait les attendre à Budapest, elle m’a dit qu’ils avaient convenu, via divers contacts, de se retrouver, « Inch Allah! », à Berlin !

Un ingénieur de Homs m’a raconté que son groupe a tenté la traversée vers l’île de Kos à trois reprises. Il m’a expliqué que les passeurs turcs s’y connaissent à peu près autant en navigation que leurs passagers et qu’il a fini par prendre lui-même les commandes. Il avait les larmes aux yeux quand il m’a parlé de la responsabilité énorme qu’il a dû assumer: la vie des quarante autres passagers. Un gynécologue de Damas diplômé d’Odessa m’a raconté, avec un fort accent ukrainien, que sa femme, son père et un cousin étaient toujours cachés dans les bois à la frontière hongroise et qu’ils espéraient éviter la police et arriver à Budapest en taxi! Quand je lui ai demandé s’il comptait un jour rentrer en Syrie et si, d’après lui, c’était le cas de la plupart de ses compatriotes, il m’a dit que non. Beaucoup ont vendu leurs biens, souvent à des prix dérisoires, pour payer le voyage. Une grande partie du pays est dévastée. Certains en veulent à Daesh, d’autres à Assad, d’autres encore à l’Armée syrienne libre. Le pays est tellement divisé qu’il est devenu impossible de faire confiance à qui que ce soit. Toutes les factions peuvent s’en prendre à vous, en vous enrôlant de force ou en vous tuant.

Des réfugiés devant la gare de Keleti.
Des réfugiés devant la gare de Keleti. © REUTERS

Et à la gare de Keleti, quelle est la situation ?

Au cours des dernières semaines, la situation a changé de jour en jour à Keleti, parfois même d’heure en heure. Quand je suis arrivé à Budapest, le 6 septembre, le gouvernement venait de rouvrir la gare et autorisait à nouveau les migrants à embarquer pour l’Autriche. Plus de manifestation devant la gare donc, mais plutôt un campement de transit dans le sous-sol reliant le métro à la gare, et une longue file d’attente. Quand je me suis rendu sur place un après-midi de début de semaine, j’ai pu constater l’importance de l’engagement de la société civile hongroise, des associations comme Migration Aid, mais aussi des particuliers. J’ai notamment fait la connaissance d’Edna, une Hongroise vivant à Malte et de passage à Budapest. Comme plusieurs autres, elle a eu l’idée de récolter de l’argent sur Internet dans le but d’acheter des billets de train pour les familles de réfugiés s’entassant jour après jour aux abords de la gare, afin qu’elles puissent quitter le pays au plus vite. Elle faisait des allers-retours le long de la file de réfugiés encadrée par la police quand je l’ai accostée. Debout depuis une trentaine d’heures, elle n’arrivait pas à se décider à quitter les lieux pour rentrer se reposer mais elle avait envie de parler. Nous avons donc discuté pendant trois heures et elle m’a fait faire le tour du campement. Entre les tentes de camping et les matelas, les associations de civils avaient installé leurs stands: vêtements de seconde main, centre médical, centre de collecte et de distribution de nourriture et aussi, essentiel pour les migrants, un endroit pour recharger les smartphones et autres tablettes indispensables pour s’informer et garder le contact avec les parents et amis restés au pays ou éparpillés entre la Turquie et l’Allemagne.

Certains migrants s’étaient fait arnaquer par des chauffeurs de taxi, des agents de change ou des patrons d’hôtel peu scrupuleux, exigeant des sommes folles pour leur service, avec, parfois, violence à la clé.

Nous avons croisé d’autres volontaires aidant les familles à obtenir un titre de transport ou s’occupant des enfants. J’ai aussi vu pas mal de gens apporter des sacs de dons à Migration Aid ou discuter tout simplement avec les migrants. Sur les murs du sous-sol, des pancartes indiquaient en anglais et en arabe que l’eau du robinet en Hongrie est potable. Une autre, soulignant une triste vérité, disait en substance: « Tout ce que vous recevez ici vous est amicalement offert par les citoyens de ce pays, PAS par son gouvernement ». En effet, les autorités se sont comportées à Budapest comme si elles niaient la présence de ces milliers de migrants, pour la plupart clandestins, un peu comme si elles refusaient d’être mises devant un fait accompli. Si les migrants ont été pris en charge dans des camps comme Bicske ou Debrecen, à Keleti, rien n’a été mis en place par les pouvoirs publics, ni unités sanitaires, ni cantines mobiles. Mais, globalement, l’atmosphère y était bon enfant. En revanche, Edna m’a aussi raconté avoir entendu dire que certains migrants s’étaient fait arnaquer par des chauffeurs de taxi, des agents de change ou des patrons d’hôtel peu scrupuleux, exigeant des sommes folles pour leur service, avec parfois violence à la clé. Dans la gare même, l’embarquement dans les trains pour la frontière autrichienne se déroulait plutôt bien, sous supervision policière.

A la gare Keleti de Budapest.
A la gare Keleti de Budapest. © REUTERS

On voit la Hongrie comme un pays anti-migrants avec la politique répressive d’Orbán, est-ce le cas dans la population en général? Comment réagit-elle en voyant arriver ces réfugiés en masse ? A-t-elle peur ou ressent-elle, au contraire, l’envie de les aider ?

Il y a toujours des extrémistes, mais je crois que la majorité de la population hongroise est en fin de compte partagée entre la compassion et la volonté d’aider d’une part, et la peur qu’éveille en eux cet afflux massif et incontrôlé de l’autre. La Hongrie est un pays plutôt conservateur et culturellement homogène, qui n’est pas habitué à l’altérité, à la différence. Le choc a été d’autant plus dur. En outre, certains facteurs n’ont pas aidé. Je pense à la campagne anti-migrants menée par le gouvernement avant que la crise ne prenne ces proportions. Mais je pense aussi au comportement de nombreux migrants, qui n’ont pas toujours fait preuve d’une grande collaboration et ont parfois entravé la bonne gestion de cette crise, en s’échappant des camps d’enregistrement, en forçant les cordons de police, en s’engageant à pied sur les autoroutes entrainant ainsi leur fermeture, etc. Cela a pu éveiller un sentiment que, pour le coup, Viktor Orbàn a très bien résumé : « Ils ne frappent pas à notre porte, ils l’enfoncent ». Mais comme je l’ai souligné ci-dessus, l’engagement de la sphère civile a été exemplaire, les dons ont afflué et je pense que la plupart des migrants auront fait la part des choses entre l’accueil des autorités et celui des citoyens hongrois. C’est en tout cas le discours que beaucoup m’ont tenu.

Des réfugiés sur une autoroute menant à Budapest après avoir quitté le camp de trabsit de Roszke.
Des réfugiés sur une autoroute menant à Budapest après avoir quitté le camp de trabsit de Roszke. © REUTERS

Quel est votre sentiment général après cette expérience ?

Ce fut une expérience enrichissante que j’aurais aimé poursuivre plus longtemps si j’en avais eu l’opportunité. S’il est vrai que la question des migrants divise, il n’y a à mon sens pas à se poser mille questions face à ces personnes, à ces familles qui arrivent chez nous après un tel voyage: il faut les aider. Cela dit, à plus long terme, je crois qu’il ne faut pas être naïf. Il y aura des problèmes d’intégration et le sentiment qui dominera chez eux au cours des prochains mois et après sera probablement la déception. Tous veulent aller en Allemagne, or ils seront répartis à travers l’UE. Ensuite beaucoup n’ont aucune chance d’être reconnus comme réfugiés et une bonne partie de ceux qui le seront ne verront jamais leur rêve se réaliser. Ils voient en l’Europe, en l’Allemagne en particulier, l’Eldorado. C’est justement cet avenir rêvé qui leur a permis de traverser toutes les épreuves et de prendre bien des risques. Nous les percevons comme des réfugiés souhaitant se mettre à l’abri mais leur rêve à eux est bien celui de migrants économiques. Vu le contexte actuel, combien nos sociétés seront-elles à même d’en intégrer effectivement? Que ferons-nous des déçus? Contre qui sera dirigé leur ressentiment ou celui de leurs enfants? N’iront-ils pas grossir les rangs des mécontents issus de précédentes vagues d’immigration? Beaucoup de questions mais qui sont, je le pense, légitimes.

Des réfugiés en route vers Budapest.
Des réfugiés en route vers Budapest. © REUTERS

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