Macronleaks: Macron visé par un piratage massif
A la veille du second tour dimanche entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, la présidentielle française a connu un énième rebondissement avec la fuite sur internet de milliers de documents de la campagne du candidat centriste, une « déstabilisation » aussitôt dénoncée par l’ancien ministre.
La révélation de ce piratage massif, « dans la dernière heure de la campagne officielle » (NDLR: la campagne a officiellement pris fin vendredi à 22h00 GMT), « relève manifestement de la déstabilisation démocratique, comme cela s’est déjà vu aux Etats-Unis pendant la dernière campagne présidentielle », a dénoncé En Marche!, le mouvement de M. Macron, dans un communiqué.
Dès leur diffusion, via Twitter, ces documents piratés ont été relayés par l’extrême droite.
« Les #Macronleaks apprendront-ils des choses que le journalisme d’investigation a délibérément tues ? Effrayant, ce naufrage démocratique », a lancé Florian Philippot, le vice-président du Front National, le parti d’extrême droite de Marine Le Pen, juste avant minuit et la clôture de la campagne officielle.
Vendredi soir, ce sont au total 9 Go de documents internes à la campagne d’Emmanuel Macron qui ont été diffusés sur le web, par un internaute baptisé EMLEAKS.
L’autorité électorale française appelle les médias à ne pas « relayer » les documents
La commission de contrôle de la campagne électorale française a appelé samedi les médias à ne pas relayer le contenu des documents internes de l’équipe du candidat centriste Emmanuel Macron publiés sur les réseaux sociaux.
Cette instance s’est réunie samedi matin pour « faire le point sur les suites de l’attaque informatique qu’a subie l’équipe de campagne de M. Macron », indique-t-elle dans un communiqué.
La Commission « souligne que la diffusion ou la rediffusion de telles données, obtenues frauduleusement, et auxquelles ont pu, selon toute vraisemblance, être mêlées de fausses informations, est susceptible de recevoir une qualification pénale à plusieurs titres et d’engager la responsabilité de ses auteurs ».
« A la veille de l’échéance électorale la plus importante pour nos institutions, elle appelle l’ensemble des acteurs présents sur les sites internet et les réseaux sociaux, au premier chef les médias, mais également tous les citoyens, à faire preuve d’esprit de responsabilité et à ne pas relayer ces contenus, afin de ne pas altérer la sincérité du scrutin, de ne pas enfreindre les interdictions édictées par la loi et de ne pas s’exposer à la commission d’infractions pénales », a-t-elle mis en garde.
– Parallèle avec Hillary Clinton –
Au total, il y a « des dizaines de milliers d’emails, de photos et de pièces jointes, datant du 24 avril au plus tard » (le lendemain du premier tour de la présidentielle), selon WikiLeaks. Le site fondé par Julian Assange, qui a relayé sur son compte Twitter le lien hypertexte menant à ces documents, a assuré ne pas être à l’origine de cette opération de piratage qu’il a aussitôt baptisée du hashtag #MacronLeaks ».
Ces fichiers piratés sont des courriels ou des « documents comptables », tous « légaux », a précisé En Marche! dans son communiqué.
« Ceux qui font circuler ces documents ajoutent à des documents authentiques nombre de faux documents, afin de semer le doute et la désinformation », a affirmé l’équipe de M. Macron, en faisant un parallèle avec le piratage qui avait visé l’équipe de Hillary Clinton, la candidate démocrate à la présidentielle américaine de 2016.
Après enquête sur ce piratage, les agences de renseignement américaines avaient accusé la Russie d’avoir interféré dans la présidentielle des Etats-Unis afin de favoriser le candidat républicain Donald Trump, élu le 8 novembre.
– #MacronLeaks derrière #KohLanta –
En février, les serveurs d’En Marche avaient été coupés durant quelques minutes, à la suite d’attaques venant d’Ukraine selon le mouvement d’Emmanuel Macron. En mars, le mouvement d’Emmanuel Macron avait aussi été la cible de tentatives de hameçonnage (« phishing »), attribuées là à un groupe russe selon l’entreprise japonaise de cybersécurité Trend Micro.
Dans un communiqué aux premières heures samedi, la Commission nationale de contrôle de la campagne présidentielle (CNCCEP) française a recommandé aux médias « de ne pas rendre compte du contenu » de ces documents issus d’une « attaque informatique », rappelant que « la diffusion de fausses informations est susceptible de tomber sous le coup de la loi ».
Ce piratage pourrait-il avoir une incidence sur le vote des électeurs français dimanche? Si le hashtag #MacronLeaks était très haut parmi les recherches des internautes dans la nuit de vendredi, il n’était cependant qu’en deuxième position, derrière celui de #KohLanta, une émission de téléréalité mettant en scène des aventuriers sur une île déserte.
Dans les derniers sondages publiés vendredi, avant la clôture de la campagne officielle, Emmanuel Macron était encore largement en tête, avec 61,5 à 63% des voix, contre 37 à 38,5% pour Marine Le Pen.
A deux jours du vote, la participation potentielle reste cependant relativement faible: seules 68% des personnes interrogées se disent certaines d’aller voter.
Avant les révélations sur ce piratage massif visant la campagne de M. Macron, ancien ministre de l’Economie du président socialiste François Hollande, la tension était déjà montée avec l’annonce de l’arrestation dans la nuit de jeudi à vendredi d’un ancien militaire converti à l’islam, à proximité d’une base aérienne militaire, à Evreux, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Paris.
– ‘Sécurité maximale’ –
Sous surveillance depuis 2014 pour sa radicalisation, l’homme avait prêté allégeance au groupe Etat islamique, selon une clé USB saisie dans son véhicule, où se trouvaient également des drapeaux de l’EI. Un fusil à pompe a aussi été découvert dans un fourré proche.
Les enquêteurs cherchent à déterminer si le suspect était sur le point de commettre une action violente.
Le 20 avril, trois jours avant le premier tour de la présidentielle, un policier avait été tué sur l’avenue parisienne des Champs-Elysées. L’attaque avait été revendiquée par l’EI, à l’origine de la plupart des attentats qui ont fait 239 morts dans le pays depuis janvier 2015.
Dimanche les deux candidats voteront dans le nord de la France, M. Macron dans la station balnéaire du Touquet Mme Le Pen dans son fief ouvrier d’Hénin-Beaumont.
Les mesures de sécurité seront renforcées dimanche autour des bureaux de vote, et des dizaines de milliers de policiers et gendarmes mobilisés, a annoncé le ministère de l’Intérieur, qui a promis que le scrutin se tiendra dans « des conditions de sécurité maximales »
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