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Jeune, idéaliste et morte : elle n’aura été maire que 48h

Le Vif

Gisela Mota, 33 ans, la jeune maire d’une ville mexicaine est morte assassinée le lendemain de son entrée en fonction. Sa mort est devenue le symbole tragique de la violence qui règne dans le pays.

Quand les hommes armés et encagoulés sont entrés chez elle, la jeune maire de Temixco, au sud de Mexico, a préféré se rendre afin d’épargner sa famille, racontent ses proches. Gisela Mota, qui vivait avec ses parents, était encore en pyjama ce samedi matin, tandis que sa mère préparait un biberon pour un cousin de Gisela, né la veille, lorsqu’un commando armé a sauté par-dessus le mur de sa maison et fait irruption.

« Je leur ai dit que s’ils voulaient me tuer, qu’ils me tuent en premier », a expliqué Juanita Ocampo, la mère de la défunte, lors d’un hommage devant le congrès de l’Etat de Morelos. « Mais elle leur a dit +je suis Gisela+. Ils l’ont prise parce qu’elle était très courageuse ». Les hommes armés l’ont alors emmenée dans le salon où ils l’ont abattue devant ses parents. Son père, désespéré, a poursuivi en courant les tueurs.

La mort de Gisela Mota est devenu un symbole tragique des menaces qui pèsent sur les élus à travers le Mexique et de la violence qui règne dans l’Etat de Morelos (centre), où les cartels de drogue se livrent une guerre fratricide tout en pratiquant enlèvements et extorsions sur la population. Mota, 33 ans, a été abattue au lendemain de sa prestation de serment au cours de laquelle elle s’était engagée à lutter contre la criminalité dans cette ville de 100.000 habitants, à deux heures de Mexico.

Les autorités ont accusé le cartel de Los Rojos d’être derrière la mort de la jeune édile. Son domicile, situé dans un quartier modeste de la ville, se remarque par sa porte en bois rustique et son four en argile, le long de la façade extérieure. La veille de son assassinat, Mota avait fêté son entrée en fonction lors d’une soirée dansante avec musique traditionnelle.

Jeune, idéaliste et morte : elle n'aura été maire que 48h
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Los Rojos suspectés

Le lendemain matin, « on a entendu six coups de feu. Nous avons pensé qu’il s’agissait de pétards. Mais nous avons entendu qu’ils criaient que Gisela avait été tuée », raconte Pablo Ortega, un voisin de 48 ans, qui précise que sept hommes armés se trouvaient à bord du véhicule.

Peu après le meurtre, la police a tué deux suspects lors d’une fusillade et arrêté trois personnes, dont un jeune homme de 17 ans et une femme de 32 ans.

L’ONU a demandé aux autorités mexicaines d’enquêter « avec une perspective de genre » sur ce « crime grave », estimant qu’il « perturbait l’exercice des droits politiques des femmes » au Mexique. Selon le gouverneur de Morelos Graco Ramirez, le cartel de Los Rojos aurait assassiné Mota pour dissuader les autres maires de soutenir le plan controversé de placer les polices des états et municipales sous un « commandement unifié » afin de lutter contre la corruption. Ramirez a salué la mémoire de sa jeune collègue, « indépendante et combative », et membre comme lui du Parti révolutionnaire démocratique (PRD, gauche).

Les Rojos mènent une lutte violente contre le cartel des Guerreros Unidos à Morelos et dans l’état voisin de Guerrero pour le contrôle notamment des routes de la drogue.

Le cartel des Guerreros Unidos a acquis une large notoriété en 2014 après avoir été désigné comme principal suspect du meurtre présumé de 43 étudiants disparus dans l’état de Guerrero. C’est à Temixco que le fils du poète mexicain de renom Javier Sicilia, âgé de 24 ans, avait été retrouvé mort, avec quatre de ses amis, en 2011.

100 maires attaqués

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A la mairie, les drapeaux ont été mis en berne et deux couronnes de fleurs ornées de rubans noirs ont été fixées aux murs. Dans le cimetière poussiéreux où repose Gisela Mota, une vingtaine de couronnes sont visibles. Sur l’une d’elle on peut lire « tu étais mon espoir ». « Elle était déterminée à changer les choses » à Temixco, indique à l’AFP Miriam Martinez, secrétaire générale de l’Union des travailleurs. Le prédécesseur de Mota, Miguel Angel Colin, a laissé la municipalité dans un état désastreux, selon la syndicaliste, « avec des dettes et des salaires impayés ». Près de 100 maires et plus de 1000 employés municipaux ont fait l’objet d’attaques au cours des dix dernières années dans le pays, selon l’association des autorités locales du Mexique.

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