Hitler : ni Dieu ni maître
Hitler espérait-il fonder une nouvelle religion ? C’est ce que démontre Arnaud de la Croix dans son nouvel ouvrage, La religion d’Hitler.
Adolf Hitler rêvait de supplanter la religion chrétienne dans le coeur du « paysan allemand ». Mais en août 1942, l’armée allemande s’enlise à l’Est et, à l’intérieur, le Reich subit les bombardements alliés. Il s’agit, pour l’heure, de soutenir le moral des troupes et de la population allemandes. Pour des raisons tactiques, pas question « d’éjecter » à ce moment-là les pasteurs protestants et les prêtres catholiques, garants de ce moral. L’aspiration d’Hitler ne fait pourtant aucun doute. En août 1942 toujours, il déclare à son cercle : « Quel besoin avons-nous d’une fable inventée par les Juifs ? En quoi l’histoire de quelques Juifs pouilleux et épileptiques pourrait-elle nous concerner ? »
De fait, les nazis détestent le christianisme, « tout ce fatras non chrétien apporté par le Syrien Paul, Augustin ou d’autres ». Ils reprochent d’ailleurs aux Eglises, infestées de Juifs, d’avoir imposé l’universalisme, la tolérance et le soin obligatoire aux faibles et aux malades. A leurs yeux – et Hitler en premier -, le christianisme est « une forme religieuse dépassée ». Il s’agit de rompre radicalement avec ces « religions orientales » et d’en fonder une nouvelle.
Dans les deux premières parties de La religion d’Hitler, Arnaud de la Croix démonte d’abord les croyances d’un Hitler, baptisé dans l’Eglise catholique et enfant de choeur, chrétien, néopaïen ou athée. « En revanche, Hitler considère que le national-socialisme est bien plus qu’un mouvement politique, il est aussi un mouvement religieux. La nouvelle religion constitue bien le « noyau du réacteur » national-socialiste », déclare l’auteur, à qui l’on doit déjà Hitler et la franc-maçonnerie et Les Templiers, chevaliers du Christ ou hérétiques ? Dans la troisième partie, Arnaud de la Croix décrypte alors le système de valeurs et de normes de la « nouvelle foi » : passionnant !
Son peuple est son Dieu
Le Fürher, le nouveau messie ? C’est ainsi qu’Hitler se voit. Pour ce faire, il raconte sa « mystérieuse révélation », qui aurait fait de lui un messie. Hospitalisé en octobre 1918, Hitler connaît une crise de cécité, sans doute d’origine psychologique : il entend l’appel du Volk (NDLR : le peuple). « Il ne le faisait pas juste pour obtenir un effet rhétorique ; il croyait réellement ce qu’il disait, qu’il avait été choisi par le Destin », raconte un dirigeant nazi. Quelle est sa « grande mission » ? Sauver le peuple du péché. Car si dans la religion hitlérienne, la notion « judaïque » de péché originel a disparu, il existe une autre forme de péché : le péché contre le sang, un dogme inébranlable dans la religion d’Hitler. Le sang permet à l’homme d’exister pour l’éternité, à travers ses descendants, ce peuple éternel : l’au-delà d’Hitler. Il convient dès lors de préserver le sang du métissage pour qu’il ne disparaisse jamais. Ainsi le cinquième commandement, « Tu ne tueras point », est considéré comme une insulte au génie aryen. Pour Hitler, le seul dieu est son peuple. Ce dieu qui va le décevoir en perdant la guerre…
La religion d’Hitler, par Arnaud de la Croix, Editions Racine, 211 p.
Les extraits dans Le Vif/L’Express de cette semaine.
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