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En prison pour une jupe trop courte : « l’occident aide le Maroc à maintenir ses mensonges »

Wided Bouchrika Journaliste free-lance

« Le Maroc est parfois présenté comme un exemple en Afrique du Nord. En réalité, c’est un pays qui pratique l’arrestation arbitraire, la dictature et la torture » dit Mohamed Achahbar, vice-président du bureau belge de l’Association marocaine des droits humains AMDH.

Deux affaires ont choqué les médias internationaux ces dernières semaines. Le premier est celui de ces deux jeunes femmes, âgées de 19 et 23 ans, qui ont été interpellés mi-juin à Inezgane, près d’Agadir. Victimes de harcèlement alors qu’elles traversaient un marché populaire, elles ont d’abord été secourues par les forces de l’ordre, avant d’être conduites au commissariat où elles ont dû signer des aveux. Accusées « d’outrage à la pudeur », elles viennent d’être acquittées, purement et simplement. Le jugement est considéré comme « historique » de la part de plusieurs acteurs de la société civile qui ont soutenu les deux désormais ex-accusées. La deuxième affaire concerne cinq jeunes qui ont été arrêtés pour avoir bu du jus d’orange en journée lors du ramadan. Pour ce simple fait, ils sont enfermés jusqu’au 14 juillet au moins et peuvent être condamnés à une peine de 6 mois de prison.

Torture

Si ces histoires ont interpellé une partie de la population et la presse internationale, elles ne sont pas neuves et encore moins exceptionnelles au Maroc. « De tels faits sont simplement régulièrement ignorés par la presse internationale » dit Mohamed Achahbar. « Le Maroc fera toujours tout pour montrer une image positive, mais l’ouest est responsable du maintien de cette illusion. La réalité est en effet tout autre » jure Achahbar. « Aujourd’hui, ces deux évènements sont montrés comme des exceptions. Cependant, dans ce pays, les arrestations arbitraires de journalistes, d’activistes ou de toute personne qui souhaite changer la situation sont monnaie courante. Tout comme la torture dans les prisons. Enfin, le roi Mohammed VI à tous les pouvoirs.

Pourquoi un Marocain ne peut-il pas être athée ?

En 2011, le printemps arabe a aussi touché le Maroc sous la forme du mouvement du 20 février. Une force politique de gauche a tenté de faire bouger le pays de manière positive. Mais le roi a réussi à endiguer ce mouvement de manière astucieuse en promettant une révision de la constitution. Il l’a fait, mais en passant par un comité propre. Cette constitution n’a donc pas de réelle légitimité ou de crédibilité. Par ailleurs cette constitution est connue pour être arbitraire. Ce qui explique qu’il n’est nulle part indiqué de quelle manière les habitants doivent s’habiller. Par exemple, on n’arrête pas les femmes en bikini sur la plage, mais bien les filles avec une jupe trop courte dans un souk. Au Maroc on part du principe que si l’on a un nom marocain on devrait être né musulman. Il n’y a pas d’égalité entre homme et femme et il n’y a pas de liberté de religion puisqu’au Maroc il n’y a pas de séparation entre l’état et l’église.

Les attaques contre les homosexuels

À Fez, un homme soupçonné d’être un homosexuel a été tabassé. Les images se sont répandues comme une traînée de poudre via les réseaux sociaux. Achahbar précise pourtant qu’il ne s’agit pas là d’une explosion de ce genre d’incidents, mais plutôt que, grâce aux médias sociaux, ils ne sont plus ignorés. Lier ces évènements à des mouvements terroristes comme l’état islamique est exagéré et absurde. C’est la constitution marocaine qui encourage ce genre d’extrémisme. À la place de protéger la population marocaine, certains ont l’impression qu’il existe une espèce d’impunité pour ce genre de faits et qu’ils peuvent prendre individuellement « les choses en mains ».

La majorité souhaite tout de même que les choses changent

« On ne peut cependant pas généraliser. La surexposition médiatique de l’arrestation de ces deux jeunes filles pourrait donner l’idée que le citoyen marocain moyen accepte sans broncher le Code pénal, alors qu’en réalité la majorité aimerait que les choses changent. Nous devrions être de libre de déterminer ce en quoi nous croyons ou non. C’est pour cela qu’il doit y avoir une séparation entre les pouvoirs. Des associations comme AMDH souhaitent sensibiliser la population sans en faire une question politique. Mais il ne peut y avoir un changement fondamental dans la société marocaine si le roi garde toutes les cartes en mains. Et c’est sur cela que les médias et la société internationale devraient se pencher. »

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