Carte blanche
Pourquoi je donne à manger aux migrants de Zeebrugge
Ronny Blomme vient en aide au groupe de réfugiés iraniens à Zeebrugge. En leur donnant à manger. Un geste de rébellion face à la consigne du gouverneur de la région. « Nous aidons là où les politiques ont failli. »
Beaucoup de personnes se demandent pourquoi je fais tout ça. Sur les médias sociaux, les réactions sont parfois virulentes : « Pourquoi donner quand on ne peut rien recevoir en retour ? »
Il semble qu’aujourd’hui beaucoup de gens sont incapables de répondre à cette simple question alors que pour moi elle est évidente : je ne souhaite à personne de vivre de cette façon .
Avant, je ne croisais ces personnes que de loin, dans les dunes où je promenais quotidiennement mon chien. Ils fixaient souvent la mer, le regard au loin. Tentant d’apercevoir le but de leur voyage par-delà les flots. Ils me racontaient que, là-bas, ils avaient une femme, une famille qui les attendait et que la Mer du Nord était leur dernier obstacle avant de pouvoir les rejoindre.
En les voyant ainsi, je me disais à quel point, ma femme et moi, nous vivions une vie confortable dans notre appartement avec notre pension qui tombe tous les mois. Je me rassurais en songeant, fort de mon expérience d’ancien militaire, qu’avec la douceur de cet hiver, il était « faisable » de survivre en dormant dehors.
Mais il y a quelques semaines, il s’est mis à geler. Emmitouflé dans mon gros manteau d’hiver, alors que d’autres grelottent en mendiant de la nourriture, il était impossible de faire comme si de rien n’était. Surtout en apprenant qu’il y avait eu des plaintes pour vol et nuisance. Je n’étais pas fâché, juste inquiet : cette « nuisance » n’était provoquée que par un sentiment d’urgence.
Avec ma femme et quelques voisins, nous avons pris l’initiative de leur venir en aide. Nous leur apportions deux fois par jour des tartines et du thé chaud pour les réchauffer. En étant en contact avec ces derniers nous sommes vite rendus compte que leur histoire était bien différente de celle servie habituellement et qui les dépeins comme des illégaux qui envahissent notre pays. En les côtoyant, on s’aperçoit qu’il s’agit avant tout de personnes. De personnes qui ont besoin d’aide.
En leur venant en aide, nous avons pratiquement réduit à néant la « gêne » qu’ils pouvaient occasionner. Avec l’aide d’organisation, nous avons pu rassembler du matériel de première nécessité. Et comme à cause du froid certains étaient gravement malades, nous leur avons fourni des médicaments. Ma femme était infirmière et elle s’est juste remise au travail.
Pourtant la Belgique n’est pas leur destination finale. Il semble qu’ils ne vivent que pour rejoindre l’Angleterre. Ils n’accordent que peu d’importance à une procédure d’asile en Belgique puisqu’ils ne veulent pas rester ici.
Les actions policières de ces dernières semaines ne vont rien résoudre. Au contraire, elles les poussent davantage vers l’illégalité et la criminalité.
Nos actions d’aide ont été qualifiées par le gouverneur de la province complicité criminelle. En quoi aider les gens dans le besoin est un crime ? Nous essayons de répondre à une situation que, ni nous, ni ces gens n’avons souhaité. Est-ce qu’on se rebelle contre la police ? Non. Est-ce que nous voulons un deuxième Calais ? Non. Mais nous venons en aide à des gens que les politiques ont laissé tomber. Cette technique de l’épouvantail n’est absolument pas efficace. C’est pour cela qu’il faut impérativement mettre en place une solution de type humanitaire. Car, avant tout, nous sommes tous des êtres humains.
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