Michel I ou le triomphe du pragmatisme
Le gouvernement de Charles Michel gère la crise de l’asile comme il a mené à bien le tax-shift : avec un sens acéré de la réalité. Cette efficacité immédiate, qui séduit la population, est inspirée par les méthodes flamandes. Mais que l’on ne s’y trompe pas, l’idéologie est bien présente. Et le court terme domine…
C’est un rouleau compresseur. Le gouvernement Michel ne laisse rien passer, il gère toutes les crises, tient ses engagements et ose prendre des décisions courageuses. Non sans s’adapter à l’actualité et à la conjoncture internationale. En un mot comme en cent : la majorité fédérale fait preuve, depuis le départ, d’un « pragmatisme qui tranche avec la politique classique, en menant une gestion quasiment managériale des affaires publiques », pour reprendre les termes de Nicolas Baygert, professeur de communication politique à l’Ihecs, l’ULB et l’UCL. Voilà l’impression laissée dans une large partie de l’opinion publique par la suédoise, éloignée des critiques horrifiées des débuts, quand on l’avait baptisée depuis l’opposition « kamikaze ». Même si les virages pris ne plaisent pas à tout le monde, loin s’en faut.
Après le tax-shift bouclé, comme promis, avant de partir en vacances, les ministres fédéraux ont géré à distance, à l’entame du mois d’août, le début de crise dans l’accueil des migrants. En un Conseil des ministres électronique, organisé sans quitter leur lieu de villégiature, ils ont rouvert 2 500 places supplémentaires dans des casernes. Une décision accompagnée d’une communication immédiate sur les réseaux sociaux. « Congés sacrifiés mais c’était nécessaire », dixit Theo Francken, secrétaire d’Etat N-VA à l’Asile et la Migration. « Un Conseil des ministres électronique: voilà une nouvelle preuve que tout se décide aujourd’hui en temps réel », constate Bruno Colmant, professeur de Finance à l’ULB, à l’UCL et à la Vlerick Management School. Pour cet ancien membre d’un cabinet ministériel libéral, cela ne fait pas l’ombre d’un doute : le gouvernement Michel est l’expression même d’un pouvoir contraint d’être pragmatique.
Un trait de caractère typiquement flamand et ultra-dominant au sein de la majorité dirigée par Charles Michel ? « Je donne cours des deux côtés de la frontière linguistique et le pragmatisme est une marque de fabrique du Nord du pays, détaille-t-il. Les Flamands suivent une logique très empirique et inductive. Ils s’inspirent davantage du monde anglo-saxon où l’on joue en permanence aux échecs, où l’on est ancré dans la réalité quotidienne, où l’on entreprend sans se poser trop de questions. Le monde latin, a contrario, est davantage un monde de principes, de grandes réformes, imprégné par la pensée de Voltaire ou de Rousseau. »
Lire l’intégralité de l’enquête dans Le Vif/L’Express de cette semaine.
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