© Stop Alibaba & Co

« Liege Airport: l’extension, laisse béton » : pourquoi un collectif s’oppose à l’expansion d’Alibaba à Liège

Une centaine d’activistes du mouvement Stop Alibaba & Co ont bloqué, lundi, la centrale à béton de Bierset, proche de l’implantation d’Alibaba, pour dénoncer l’impact social, environnemental et économique de l’extension de Liege Airport.

Lundi, à l’aube, une centaine d’activistes du mouvement Stop Alibaba & Co ont investi et bloqué la centrale à béton de Bierset, proche des entrepôts d’Alibaba. Au sommet des silos de béton, les militants, vêtus de combinaisons jetables, ont brandi fumigènes et banderoles « Stop Alibaba ». L’objectif : perturber l’extension de Liège Airport, en empêchant pendant plusieurs heures l’acheminement de béton vers les chantiers de l’aéroport. Par la même occasion, ils dénoncent l’impact écologique, social et économique de l’arrivée du géant chinois du commerce en ligne, Alibaba, en Belgique.

En novembre dernier, Cianiao, la filiale logistique d’Alibaba, a ouvert son premier hub logistique européen sur le tarmac de l’aéroport de Liège. Annoncé fin 2018 par Charles Michel, l’accord est célébré comme une consécration par la région liégeoise, qui investit dans la logistique pour relancer son économie. Liège Airport ambitionne d’entrer dans le top cinq européen des aéroports de fret. Et cette expansion permettra au concurrent chinois d’Amazon de livrer des colis partout en Europe, en moins de 72 heures.

Depuis, l’extension de Liège Airport est en route et prend de la vitesse, « sous couvert de permis d’urbanisme octroyés par la commune de Grâce-Hollogne », explique le collectif Stop Alibaba & Co. « Or, l’étude d’incidence environnementale, qui est nécessaire pour le renouvellement du permis d’exploitation de l’aéroport, n’est pas encore clôturée. » Dès lors, le collectif réclame un moratoire, « le temps de réaliser une véritable étude d’incidence globale [sur l’implantation la filiale logistique d’Alibaba, Cainiao, à l’aéroport de Liège] et d’organiser un authentique débat démocratique ».

« Nous estimons que l’étude doit se faire à une plus grande échelle et que les impacts sur la santé, l’économie, l’emploi, le social ou encore le trafic routier doivent être pris en compte », explique le collectif. Stop Alibaba & Co pointe du doigt les émissions de CO2 amenées par l’expansion de l’aéroport, la pollution de l’air, les nuisances sonores ou encore la menace que fait peser cette logistique aéroportuaire sur l’économie locale.

Émissions carbone et artificialisation des sols

Le collectif Stop Alibaba & Co avance également une étude, publiée en 2021, par le climatologue Pierre Ozer. Elle établit que « de 2013 à 2018, les efforts de la Wallonie pour faire diminuer les émissions de CO2 ont été annulés par le développement de l’activité aérienne à Liège Airport. » Dans le Soir, Liège Airport a affirmé que fermer cette extension « ne changerait rien à l’effet de serre » et ne ferait que déplacer le problème, puisque ces vols seraient transférés vers d’autres aéroports. Cependant, pour le chercheur Pierre Ozer, également militant au sein de Watching Alibaba, l’aéroport de Liège est le « seul aéroport de fret d’Europe ouvert 24h sur 24, sept jours sur sept » et cette flexibilité pourrait porter préjudice à l’objectif de neutralité carbone, ambitionné par le paquet « Fit for 55 » de l’Union européenne à l’horizon 2030.

L’artificialisation des sols inquiète aussi tout particulièrement le collectif. « Les eaux de pluies, mais également l’eau utilisée pour nettoyer les avions et les pistes, constituent quand même un sacré débit », explique Stop Alibaba & Co. « Cette eau va se retrouver dans des bassins d’orage, qui sont en réalité uniquement une zone tampon, et se déversera finalement, non pas dans le sol ou les nappes phréatiques par exemple, mais dans les égouts et les cours d’eau. » Une telle perturbation du cycle de l’eau fait grincer des dents dans une province qui fut gravement touchée par les inondations de la mi-juillet.

Emplois à moyen-terme

Si pour l’heure, Liège Airport vante la création d’emplois amenée par Cianiao – à terme, 900 emplois devraient être créés – le collectif Stop Alibaba & Co ne l’entend pas de cette oreille. « Nous en avons assez que l’on justifie un tel projet sous couvert de création d’emplois », s’offusque le collectif. Les militants soulignent que le taux d’emploi initialement annoncé ne cesse de diminuer, et craignent que, à moyen-terme, les employés ne soient finalement remplacés par des machines, moins coûteuses. « Il serait bien plus intelligent d’investir l’argent du contribuable [un milliard 50 millions d’euros aurait été injecté dans cette expansion estime le collectif] dans des entreprises créatrices d’emplois plus durables et plus respectueux des êtres vivants », conclut Stop Alibaba & Co.

Le débat sur les conditions de travail dans le secteur de l’e-commerce est relancé. Lundi, dans le magazine flamand Humo, le président du PS, Paul Magnette, a affirmé vouloir que « la Belgique devienne le premier pays sans e-commerce, avec de vrais magasins ». Paul Magnette qui, en 2016, en sa qualité de Ministre-président du gouvernement wallon, aurait plaidé pour que le géant chinois du commerce en ligne pose ses bagages en Belgique…

Emma Grégoire

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