Ecolo: le calvaire après la défaite
En mai 2014, Ecolo perdait les élections ainsi qu’une bonne partie de ses moyens. Plus de 300 emplois passèrent à la trappe. Un an plus tard, nombre d’anciens élus et d’employés n’ont toujours pas retrouvé de job. Le poids de l’étiquette politique est difficile à porter.
Dans une entreprise, on parlerait de licenciement collectif. Plus de 300 emplois supprimés du jour au lendemain. En politique, on appelle cela les risques du métier. En perdant aux élections du 25 mai de l’année dernière plus de 195 000 voix à la Région, 41 000 à Bruxelles, 90 000 au fédéral, ainsi que 3,2 millions de financements publics, Ecolo ne pouvait pas éviter la casse sociale. Au final, 255 équivalents temps plein ont reçu leur C4. S’y ajoutent 136 ETP (équivalents temps plein) attachés au parti qui ont dû tous remettre leur démission. Seuls 68 ont été réembauchés. Sans oublier les élus non-réélus : tous niveaux de pouvoir confondus, 28 ont dû songer à leur reconversion.
Que sont-ils devenus ?
Les anciens sénateurs :
– Jacky Morael : souffrant d’importants maux de dos, le Liégeois s’était volontairement présenté sur les listes en 2014 à une place non-éligible. Malgré ses problèmes de santé, il reste actif chez Ecolo.
– Céline Thibaut : la Luxembourgeoise, tête de liste dans sa circonscription en mai 2014, n’avait pas été réélue au Sénat. Son parti l’a néanmoins désignée comme sénatrice cooptée.
Les anciens députés fédéraux :
– Ronny Balcaen est toujours en recherche d’emploi. Il n’a pas souhaité répondre à nos questions.
– Juliette Boulet a été engagée chez Greenpeace (où elle avait jadis été jobiste) comme chargée de campagne. Elle a quitté Ecolo. « Si tu n’es pas quelqu’un qui compte, tu n’es plus personne. Du jour au lendemain, tu ne reçois plus un coup de fil », disait-elle dans la presse après les élections.
– Eric Jadot : le Herstalien a quitté Ecolo et ne s’était pas représenté en 2014. Il a profité de ses indemnités de départ pour reprendre des études, un MBA à Solvay. Il vient de les terminer (« avec 16,5 sur 20 de moyenne ») et s’apprête à chercher un emploi.
– Fouad Lahssaini ne s’était pas représenté aux élections, déçu du fonctionnement de son ancien parti. Il a retrouvé du travail dans une asbl où il dispense des formations sur la prison et les peines alternatives, ses sujets de prédilection lorsqu’il était député.
– Thérèse Snoy et d’Oppuers ne s’était pas représentée et a pris sa retraite. Elle profite de son temps pour s’occuper de ses petits-enfants et reste active au sein d’associations.
Les anciens députés wallons
– Manu Disabato : après les élections, Ecolo lui avait offert un poste de conseiller politique. Le Hennuyer avait décliné. « On me proposait un job, je cherchais un défi avec des responsabilités. J’ai préféré que la politique ne devienne pas alimentaire ». Celui qui estime que la politique peut être un handicap sur le marché de l’emploi a suivi des cours d’anglais et de néerlandais, a postulé début juillet à sa première offre d’emploi mais entend mettre sur pied sa société de consultance en développement stratégique et communication.
– Veronica Cremasco : passionnée d’aménagement du territoire, la Liégeoise a rapidement retrouvé un emploi dans son domaine de prédilection. Elle a été embauchée à la fois par la maison de l’urbanité (où elle est en charge de l’édition francophone des Cahier de l’espace public) et par l’ordre des architectes comme consultante. « Quand ils sont venus me chercher, j’ai cru qu’il y avait erreur sur la personne ! », raconte celle qui craignait payer ses 5 ans de mandataire « toute sa vie ».
– Xavier Desgain : toujours conseiller communal à Charleroi, l’ancien député n’a pas encore retrouvé de poste. C’est la première fois qu’il se retrouve sur le marché de l’emploi, alors qu’il avait jusque-là « toujours travaillé d’une façon ou d’une autre pour Ecolo ». Après le scrutin, il avait postulé en interne et s’était retrouvé en concurrence avec la personne qu’il avait lui-même engagé lorsqu’il était parlementaire.
– Monika Dethier-Neumann : la députée germanophone s’était présentée sur les listes européennes comme première suppléante. « C’était surtout symbolique. Pour moi, ce n’est pas un projet d’être élu toute sa vie. Les mandataires doivent être représentatifs des citoyens ». Elle a repris son activité d’architecte d’intérieur et dit ne pas avoir été bloquée par son engagement politique.
– Patrick Dupriez : l’ancien président du parlement wallon a été élu comme co-président d’Ecolo en mars dernier.
– Bénédicte Linard : dans un premier temps, elle avait envisagé de reprendre son poste d’enseignante dans le secondaire. Mais le décès d’une échevine dans sa commune d’Enghien l’a amenée à reprendre ce mandat local. Elle avait imaginé combiner avec l’enseignement mais y a finalement renoncé.
– Isabelle Meerhaeghe : cette ancienne journaliste, attachée de presse, parlementaire (ente 2009 et 2014) a rejoint la CSC Namur-Dinant en tant que permanente en charge de la diversité. Elle reste active chez Ecolo comme secrétaire régionale à Charleroi, un mandat non rémunéré.
– Christian Noiret : le Liégeois n’a pas encore retrouvé d’emploi. « Les employeurs potentiels se demandent si un ancien parlementaire sera prêt à remettre les mains dans le cambouis, alors que c’est ce qu’on fait au quotidien en politique ! »
– Marianne Saenen : officiellement retraitée, elle reste conseillère communale à Ramillies et active dans différentes asbl.
– Luc Tiberghien : le Mouscronois ne s’était pas représenté en 2014. En 2004, suite à la précédente défaite électorale d’Ecolo, il avait dû retrouver un emploi. « C’était très compliqué, cela m’avait pris 8 mois ». Il avait finalement intégré une asbl qui a accepté de le réembaucher cette fois encore.
– Yves Reinkin : cet ancien député de la Fédération Wallonie-Bruxelles a repris son poste d’enseignant. Il n’a pas souhaité répondre à nos questions.
Les anciens députés bruxellois
– Aziz Albishari a été victime d’un AVC, son état reste préoccupant.
– Dominique Braeckman : cette enseignante de formation a repris des cours pour devenir professeur de français pour étrangers.
– Jean-Claude Defossé : à 73 ans, il a renoué avec le journalisme, non plus à la RTBF mais à RTL TVI. Il ne s’était pas représenté en 2014.
– Anne Dirix est désormais retraitée mais reste impliquée dans différents projets associatifs liés à Ecolo.
– Anne Herscovici a intégré l’équipe du Ciré, association qui est active dans la défense des demandeurs d’asile, des réfugiés et des étrangers.
– Vincent Lurquin : cet avocat de formation a réendossé la toge.
– Jacques Morel : cet ancien médecin généraliste donne désormais des cours à l’UCL au sein de la faculté de santé publique.
– Ahmed Moussin : selon Ecolo, il reste conseiller communal à Saint-Josse-ten-Noode mais n’a pas retrouvé d’autre emploi. Il n’a pas souhaité répondre à nos questions.
– Marie Nagy se consacre désormais exclusivement à son mandat de cheffe de groupe au conseil communal de Bruxelles-Ville. Elle aimerait écrire un livre sur son expérience politique et envisage de se lancer dans la consultance.
– Yaron Pesztat ne s’était pas représenté en 2014, ayant le sentiment d’avoir « fait le tour de la politique » après trois mandats consécutifs. Il est désormais administrateur délégué des archives d’architecture moderne et a laissé tomber son mandat de conseiller communal « pour assurer la plus grande neutralité » dans ses nouvelles fonctions.
Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec les témoignages des « ex ».