Attentats à Bruxelles: « Les journalistes m’ont dégoûtée »
Touchés de près ou de loin par les attentats, tous les Belges sont unis dans le deuil. À Zaventem, dans le quartier européen ou encore sur le piétonnier, ils témoignent cette réalité choquante et traumatisante. Mais entre voyeurisme et information, certains journalistes n’ont parfois pas fait la différence.
Mardi, 9h10: l’explosion dans le métro à Maelbeek. Interrogée à la sortie de la station par plusieurs journalistes, une jeune rescapée est en pleurs, assaillie de questions sous l’activité incessante des photographes. « Et comment vous allez, vous? -Choquée. » Un acharnement devant lequel le téléspectateur impuissant à envie de crier « mais laissez cette pauvre fille tranquille! » Recadrée et coupée au montage, la vidéo de son témoignage ne permet pas de voir l’attroupement de caméras et de micros, ni l’intervention de la femme à ses côtés, qui demande poliment d’arrêter de poser des questions. Mais les faits sont là, certains journalistes ont franchi la limite.
Sur le piétonnier
Touchés par les événements, de nombreux Bruxellois se sont rendus sur le piétonnier devenu un symbole de solidarité, recouvert de fleurs, de messages d’amour, de bougies mais aussi de bouteilles de bières belges. « Je suis restée dans mon kot toute la journée, j’avais besoin de voir du monde. Tout le monde était uni et avec un petit groupe, on a commencé à chanter du Lennon ou encore du Brel. C’était beau », nous confie Marie Dykmans, étudiante à Bruxelles. Un beau moment très vite écourté… « Quelques journalistes ont couru pour faire des gros plans de nous. Ça casse le moment. » Une autre étudiante, Axelle Van Den Meerssche, était également présente: « c’était plus une chasse à l’image. Ce n’était plus du tout un lieu de recueillement. »
En effet, les journalistes étaient très présents en fin de journée pour couvrir le rassemblement. Certains parfois plus intrusifs que d’autres. « Je suis moi-même en école de communication. L’information doit être relayée dans le monde entier, je le comprends, mais avec pudeur et respect. Pas en bousculant les gens ou en renversant les bougies déposées, explique Marie. J’ai vu deux caméras braquées sur moi, à 15 cm de ma tête alors que je prenais un bon ami à moi dans les bras. Ce n’est pas respectueux. Un journaliste voulait une photo, l’autre demandait brusquement un témoignage. J’ai toujours répondu non poliment mais le dernier m’a répondu « ça va, connasse?! Si tu veux pas être filmée, viens pas ici. » C’est scandaleux, ils m’ont dégoûtée. »
Heureusement, Marie n’a perdu aucun proche dans les attentats. « Je n’imagine même pas ce que doivent ressentir les gens qui ont perdu un proche, en voyant cet engouement journalistique. Il y avait un contraste malsain entre les visages des personnes vraiment touchées et certains journalistes qui manquaient cruellement d’humanité et de compassion.«
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